10 janvier 2019

L'abominable homme de Säffle – Maj Sjöwall et Per Walhöo

Je n’arrive pas à me rappeler si j’avais oui ou non déjà lu ce roman de Sjöwall et Walhöo (que je prononce, sans doute à tort, Cheval et Valou, mais ça me permet de me rappeler leurs noms): j’ai découvert ce couple d’auteurs il y a une vingtaine d’années, alors que je ne connaissais rien de la Suède et pas grand chose à l’ironie et à la critique sociale. J’ai un peu appris depuis et j’apprécie d’autant plus.

Suède, début des années 70. Alors qu’il s’apprêtait à aller se coucher, le commissaire Martin Beck (notre héros, un fonctionnaire de police consciencieux, assez doué et introspectif, dénué de fantaisie – qui a dit Suédois ?) est appelé pour constater le meurtre sanglant d’un collègue, le commissaire Nyman, massacré à la baïonnette dans sa chambre d’hôpital. Accompagné de son collègue Röm, qui a lui aussi déjà une journée dans les pattes, ils vont tenter de retrouver, vite, le tueur avant que celui-ci ne recommence.

L’abominable… est un excellent roman: roman d’enquête, thriller, avec des enquêteurs aux yeux rougis (et non, ils n’iront pas dormir avant la fin de l’histoire) shootés au café et même des scènes d’actions épatantes.
Mais des scènes d’action épatantes écrites par des Suédois caustiques avec héroïsme stupide, incompétence épaisse, héros soucieux et tirs qui partent souvent à côté. Ca rajoute une bonne couche de réalisme et de suspense.

Tout le roman est aussi un parcours de la société suédoise, vue à travers sa police, force d’état pas antipathique mais prise entre son passé militaire récent, ses tentations un peu fascistes, ses côtés progressistes, ses politiciens nuls, ses policiers dévoués. Les portraits des personnages sont savoureux et touchants.
On croise aussi un paquet de paumés de la société suédoise, de gens dépassés, et quelque connards ambitieux ou méchants.
C’est souvent très très drôle, mais le discours politique et caustique du récit ne perd jamais de vue la narration principale, menée tambour battant jusqu’à sa fin terrible.

Une note contemporaine: à un moment, excellent, Einar Röm parcourt un recueil de plaintes déposées contre des policiers, comme une série de petites histoires d'injustices montrant combien la police peut être une véritable nuisance – c’est un moment fort du récit. Et on se rend compte que, même méchante, la police suédoise de l’époque l’est sans doute bien moins que la police française de maintenant.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire