05 mai 2019

Vaiana, la légende du bout du monde – Ron Clements, John Musker

Nous avons regardé en famille ce « classique Disney » et avons passé un plutôt bon moment. C’est du travail de pro, lisse et bien fait, rien à dire. J’en ressors toutefois avec le sentiment d’avoir vu un film marquant la fin d’un monde.
Certes, certains détails sont bien de notre époque : l’héroïne est une femme forte, la nature est omniprésente et le discours « écologique », le personnage masculin n’a pas une silhouette stéréotypée (il est gros, et fort, et cool) et tout ça n’est pas désagréable. 

J’ai eu toutefois en le voyant l’impression d’être plongé dans une millième déclinaison du monomythe et, pire encore, que les auteurs en étaient conscients et faisaient des clins d’oeil au spectateur conscient. Le schéma de l’histoire est réduit au plus simple (départ/refus du départ, épreuves - le dieu sur la plage, le crabe géant, le monstre de feu, confrontation, retour à la maison), sans quasiment aucune justification narrative : par exemple l’héroïne part n’importe où sur l’océan et tombe sur Maui.
Et pour bien marquer qu’on n’est pas dupe, la suite est une série de dialogues blagués avec plein de vannes entre notre jeune fille sérieuse et Mr Joker (Maui) qui lit l’histoire au second degré, commente le concept de la « princesse avec animal de compagnie débile », prévient quand les chansons vont arriver ou quand elle va lui tenir le discours poignant qui va le faire changer d’avis. (Et oui, il change d’avis. Et oui, il y a des chansons, qui sont carrément bof)
A ce point de méta, j’ai eu le sentiment que le monomythe/broadway que Disney sert depuis La Belle et la Bête était en état de mort clinique.




Le film pour enfants à grand spectacle produit maintenant d’autre choses, soit graphiquement (Kubo et les deux ficelles ou les Indestructibles 2, vu l’été dernier et que j’ai oublié de chroniquer et qui maniait le discours méta bien plus habilement, quittant le monomythe pour le remplacer par la comédie d’action familiale), sans parler des chefs d’oeuvres japonais. 

D’ailleurs, ce propos, le discours écologique montrant la nature/la mort de la nature/la renaissance par le pouvoir de la déesse de la fertilité est d’une incroyable lourdeur quand on le compare à la figure du Grand Cerf dans Princess Mononoké. Le scénario de Vaiana ne fait que transposer le schéma Bien/Mal sur Nature/Pollution, là où Miyazaki est bien plus subtil. Le film est incapable d’assumer le fait que la déesse de la fertilité reste porteuse de mort.

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