Ce roman de Christopher Priest est une réédition d'un roman apocalytique publié dans les années 70. Suite à une catastrophe dont, au fond, on ne sait pas grand-chose, des millions d'émigrants quittent l'Afrique dévastée et débarquent en Angleterre, provoquant le cauchemar sur lequel surfent les Le Pen & co depuis des dizaines d'années.
Le pays accueille d'abord ses réfugiés puis se retrouve débordé, la récession économique s'installe, le tissu de la société se déchire et on bascule peu à peu dans la guerre civile...
La grande réussite de ce roman repose sur sa mécanique de narration. On suit les souvenirs et les errances de Whitman, un type de la classe moyenne franchement moyen, gentiment de gauche, mal marié et papa d'une fille qu'il aime. Le récit éclaté, limité au point de vue de Whitman, naviguant sans repères précis entre sa vie personnelle et le déroulé de la crise, est vraiment très réussi.
Pour le reste, Notre île sombre m'a laissé une sorte de malaise, un sale arrière-goût. Non pas à cause du racisme potentiel du sujet, avec lequel le livre se dépatouille bien, mais à cause de la psychologie très déplaisante et égoïste du personnage principal. J'ai eu l'impression de regarder à l'intérieur de quelqu'un dont j'aurais préféré qu'il garde ses pensées (notamment sexuelles) pour lui.
En proposant un personnage médiocre et en utilisant une structure éclatée, Christopher Priest choisit son camp dans la grande famille de la science-fiction post-cataclysmique anglaise, le camp de J.G Ballard plutôt que celui de John Wyndham.
RépondreSupprimerAprès les quatre apocalyspes de Ballard qui exploraient quatre éléments basiques : Le Vent de nulle part (air), Sécheresse (feu), Le Monde englouti (l'eau), La Forêt de cristal (terre), Priest poursuit (achève le mouvement ?) avec l'Humain (et donc sa médiocrité).
Notre île sombre est à la fois un roman post-cataclysmique et une réflexion sur le genre.
Intéressante mise en perspective, merci. Priest évoque un peu ça dans son introduction.
RépondreSupprimerA part Vermillion Sands, je n'ai jamais réussi à lire Ballard, c'est un auteur qui m'échappe. J'ai essayé Crash et la Forêt de Cristal, à chaque fois je n'ai tenu que cinquante pages... Alors que les thèmes de cet auteur me semblent fascinants. Si tu as des points d'entrées plus facile dans son oeuvre, je suis preneur.
Je suis preneur également, moi aussi je me suis plusieurs fois cassé le nez sur ses livres sans arriver à rentrer dans son univers.
RépondreSupprimerDifficile de vous répondre ; je n'aime pas Crash, et je comprends la difficulté qu'il y a à rentrer dans ses quatre apocalypses - immobiles ou presque. Les nouvelles sont (souvent) fascinantes. Tristram les a publiées en trois gros volumes. Plusieurs de ses romans m'ont marqué : Millenium People, Empire du soleil, Sauvagerie, La Foire aux atrocités (qui est un collage littéraire plus qu'un roman).
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