Texas, 1890. Des bandits planqués en haut d’une colline, guettant la diligence convoyant de l’or, croient-ils. Ils dévalent la pente au galop, menacent le conducteur… pour découvrir que la diligence ne transporte pas le chargement à destination de la banque, mais un groupe d’U.S. marshalls bien armés. La fusillade est terrible, les corps tombent, le combat absurdement sanglant ne laisse qu’une poignée de bandits survivants. Et une étrange idée les traverse… Si nous nous emparions de l’identité des hommes de loi, pour nous rendre à la ville de Desolation, là où la population les attend ? Là où se trouve peut-être, encore, le trésor de la bande Jefferson-Dawson ?
Votre aventure commence ici, vous êtes ces bandits déguisés en marshalls, venus résoudre un mystère vieux de déjà cinq ans...
La nuit des chasseurs est un jeu de rôle complet sous forme d’un petit livret, comprenant la mise en bouche évoquée ci-dessus, la description de la ville de Desolation, ses habitants et ses mystères, et une poignée d’intrigues majeures. De quoi jouer un gros scénario ou une petite campagne (notre choix). Les appendices contiennent des considérations bien vues sur le thème, l’époque et un système de jeu que nous n'avons pas utilisé. Le tout est d’un grand plaisir de lecture, dense et serré, et donne immédiatement envie de jouer: mes lecteurs habituels sauront que c’est là mon critère pour juger les bons bouquins de jeu de rôle.
Donc, nous avons joué la nuit des chasseurs, et ça marche, et c’est très bien. Vous avez envie de passer quelques heures dans une ambiance de western crépusculaire ? Ce petit livret vous donne tout ce qu’il vous faut pour vous faire votre Deadwood à vous : PNJs, coups tordus, histoire de faux semblants, de mensonges et de rédemption.
A partir de maintenant, cessez de lire si vous avez l’intention de jouer, car je vais raconter brièvement notre version de la campagne. Le compte-rendu, allusif, fait référence aux personnages du livret.
Donc, survivants à l’attaque de la diligence par Jefferson, se trouvent Lawrence le beau-parleur et l’Indien (métis français-sioux). Et dans la diligence, plaqué au sol pendant la fusillade et découvrant avec effarement les cadavres, monsieur Flemming, venu soigner sa tuberculose dans les paysages plus secs du Texas et prendre le poste d’instituteur de Desolation. Flemming aura l’intelligence d’accepter d’accréditer le récit de la fusillade: mais oui, ces deux hommes survivants sont bien les marshalls David Schneider et Thomas Planche.
Pendant que l’instituteur prend son poste, découvre les magouilles de la ville et la disparition de sa prédecesseuse, Ms Simpson (en vérité assassinée par le tueur de filles, après avoir été collée enceinte par le maire qui: 1- l’avait violée, 2- lui a collé la réputation d’être une fille facile), les deux marshalls se prennent au jeu et chassent les bandits. A vrai dire, Lawrence est plus intéressé par le trésor, ce que l’Indien lui accorde comme une lubie.
Poursuites dans l’arrière pays, pistage jusqu’à Fort Reines, enquête sur le massacre d’une famille de Noirs, pièges, embuscades…
L’Indien sympathise avec Guthrie, le propriétaire de la mine, et d’une certaine façon avec Garreth, son contremaître. Quand Guthrie est assassiné par Loomis, c’est naturellement vers l’Indien que se tournera la veuve pour ses missions les plus délicates.
Une milice est formée en ville, mauvais souvenir de celle qui avait été formée pour lutter contre Dawson. L’espion de Loomis est trouvé, filé, chassé. Loomis abandonne Fort Reines et se perd au sud du Rio Grande. Certains se demandent pourquoi Loomis s’en prenait surtout aux fermes de la région (dont une bonne partie payent loyer à M. Price), plutôt qu’à la ville elle-même (dont l’essentiel des maisons est la propriété de M. Wilde).
Le marshall Planche (l’Indien) est envoyé à Dallas (expédition mémorable, le bandit-cow boy n’ayant jamais mis les pieds dans une grande ville) pour ramener le fils Price, à la demande sa soeur, la troublante Esther, qui pense que même si la mine d’or ne rend plus, le rapport du Federal Bureau of Geology (un Mac Guffin de quelques courses-poursuites, vols et cambriolages) laisse penser que le minerai de Bauxite, auquel l’or est mêlé, pourrait avoir une valeur encore plus grande. Au retour de Dallas, Planche manque de succomber dans une embuscade tendue par… Loomis ? Non. Par Trevor, l’homme de main de Wilde !
Avec l’aide de la jeune McLane (sa meilleure élève), l’instituteur découvre la source des gémissements mystérieux qu’on entend venir du nord, quand le vent souffle. On écoute le sol avec un appareil conçu à cet effet, et on découvre une mystérieuse cache souterraine où gémit dans les ténèbres et la puanteur un homme devenu fou. « Garreth… je vais te tuer… »
Les marshalls enquêtent aussi sur les filles disparues, avec l’aide de Ms Clara Stanford, qui tombe amoureuse de l’Indien, malgré sa crasse et son manque de vocabulaire. On commence par découvrir ces meurtres dont le sheriff et le maire avaient caché l’existence, on parle signes mystérieux, apocalypse, etc. L’Indien fait semblant de violer Ms Stanford, pour que celle-ci, devenue enceinte, puisse servir de cible au tueur (malheureusement, celui-ci s’en prendra d’abord à Dixie, la prostituée préférée du Reverend Richardson).
Les choses s’accélèrent, autour de la mine Guthrie, autour du trésor : les marshalls remontent peu à peu les pistes, le coffre à la banque, le ranch de l’Allemand, la carte très approximative, les bijoux dans les tunnels inondés de la mine (que Martha voudrait explorer à l’aide d’un système d’exploration sous-marine: pompe, tuyau, casque en bocal à poissons rouges - Flemming désapprouve). Ils se retrouvent confrontés à Polland, le détective de la Pinkerton, qui les espionne, les précède parfois, manque de tuer Lawrence...
Un marshall arrive en ville, qui prétend être un vieux copain de Planche et Schneider...
Une nuit de cauchemar, le tueur de filles manque d’éventrer Ms Stanford, se fait descendre. Et alors que les marshalls battent la campagne pour trouver pourquoi le trésor ne se trouve plus à l’endroit indiqué par la carte (réponse: il a été trouvé, déterré et gardé précieusement par Bear, l’ancien complice de Dawson), Loomis revient en ville accompagné d’une troupe de mercenaires mexicains et met en scène dans le saloon le procès dément du cadavre de Jefferson et du marshall Caine, un mort et un fou. Il y aura des enfants pris en otages, des innocents menacés, parfois tués, beaucoup de coups de feu et un duel pas propre derrière le bar entre Loomis et l’Indien.
L’histoire se termine avec Flemming, pauvre et intègre, faisant venir sa fiancé à Desolation, et les marshalls, qui ont trouvé le trésor et assassiné Bear, se séparant et disparaissant vers d’autres horizons, Lawrence vers la Californie, l’Indien vers le Minnesota, où il emmène Ms Stanford qui deviendra sa femme.
Ce fut donc une bien chouette campagne ! Nous n’avions jamais expérimenté le western en jeu de rôle, c’est un cadre qui marche très bien. Le lecteur attentif notera que nous avons modifié des éléments de l’intrigue. Loomis est devenu une ombre mystérieuse dont on voit la silhouette partout, en plus d’être un excellent tireur. Il y a eu toute une intrigue autour de la famille Guthrie, de la mine et de son avenir (et de la promesse de voir un jour - ou pas - Desolation devenir une ville minière enrichie par l’aluminium). Le trésor a été caché un peu ailleurs et j’ai introduit un paquet de fausses pistes et de rumeurs.
Pour ce qui est de l’intrigue, le jeu qui consiste à reconstituer la dernière nuit du marshall Caine est très amusant, permettant de nombreuses rencontres entre PJs et PNJs : Flemming ayant la tête qui tourne au-dessus du décolleté de la veuve de Cletus, l’Indien sympathisant avec Quincy le croque-mort, ses enfants aux grands yeux et sa soeur folle, Lawrence jouant aux cartes avec James Jr et s’infiltrant ainsi dans la banque...
Bref, c’était bien. Si vous connaissez d’autres jeux, d’autres livrets du même genre, je suis preneur !
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