En
février 1959, dans l’Oural, neuf jeunes gens bien entraînés, sept garçons et
deux filles, partaient pour une
randonnée sportive vers le Kholat-Siaskhyl,
le mont des cadavres dans la langue mansi, l’ancien peuple autochtone. Ils
ne reviendront jamais. On les retrouvera morts, certains gelés, d’autres ayant
subi des coups, éparpillés hors de leur tente lacérée. Aucun ne portait ses
chaussures.
C’était
l’époque de Khrouchtchev, un moment de
respiration après la mort de Staline. Mais aussi l’époque des escadrons de la
mort à la recherche des zeks évadés, l’époque des tests de fusées et d’armes
nucléaires. Une époque de secrets. L’enquête n’a permis aucune conclusion
définitive, les parents des disparus ont dû se battre pour accéder aux quelques
informations qu’on voulait bien leur donner.
Sur
ces faits réels passionnants, Anna Matveeva construit un roman très bancal. Son
héroïne et double fictionnel vit comme l’auteur en 1999 à Sverdlovsk/Iekaterinenbourg,
la ville d’où était originaire le groupe Dyatlov, elle se retrouve par un
hasard un peu fantastique à lire une pile de vieux documents sur le groupe. Ce
procédé, de mêler enquête réelle et fiction, est assez élégant en ce qu’il permet
de construire une relation émotionnelle avec les faits. Malheureusement la
fiction, si elle nous donne une vision intéressante de la vie en Russie à la
fin des années 90, est globalement très mal écrite, mal ficelée et sans
intérêt. Toutes les pistes intéressantes (la vision du premier chapitre, la
relation aux voisins bizarres…) sont abandonnées, et le style est au mieux
plat.
On
s’en moque un peu, car l’auteur cite et commente de nombreux documents réels
(près de la moitié du livre en fait), reproduits dans une police de caractère
spécifique, qui permettent au lecteur de disposer de tous les éléments et de se
faire sa propre opinion quant à l’explication du mystère. Prisonniers en
fuite ? Avalanche ? Accident militaire ? Opération de nettoyage ?
(Créature indicible ?)
Rien
ne colle parfaitement, on ne saura jamais. Mais le temps de ce (court)
documentaire, on sera replongé dans un monde tout aussi étrange pour la
narratrice que pour nous, lecteurs français : l’Union Soviétique des
années 1950, ses étudiants, ses sportifs, ses chansons, ses carnets de
randonnée. Le plongeon dans le passé et le beau mystère valent quand même le
coup d’œil. On songe en rêvant à ce qu’une romancière plus rigoureuse et plus
chevronnée pourrait faire d’une pareille histoire.
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