17 juillet 2013

Vermilion Sands - J.G. Ballard

Cet été, nous n'irons pas à Vermilion Sands. Je suis trop vieux, maintenant, et la destination n'est pas idéale pour les familles. Le sable, les terrasses, les maisons d'un blanc éclatant, les fêtes, certes... Tout cela est passé. Vermilion Sands était une destination à la mode dans les années 70, maintenant la station balnéaire n'est plus que l'ombre d'elle-même, le souvenir d'un souvenir. Il aura fallu les drogues, les modes étranges du temps pour convaincre la jet-set de s'aventurer là-bas. La faune est dangereuse... Raies, scorpions, insectes incrustés de joyaux, aux poisons rares... Et la mer absente. Il faut du temps pour le comprendre, les photos laissent parfois croire que les étendues brillantes, au-delà des quais... Non, ce n'est que du sable, de la silice solidifiée. Les yachts dérivent paresseusement sur de larges roues chromées. Des plages infinies, sans les ennuis des algues, des vagues et de l'écume. Partir là-bas était l'ultime pulsion du snobisme. Ecouter les statues chantantes, habiter une maison psychotronique, sculpter les nuages au dessus de Coral 5.
Qu'en reste-t-il, maintenant ? Une collection de souvenirs mordants, amers, par James Graham Ballard, chroniqueur de ce lieu unique, de ses artistes déviants, de ses femmes aux noms de parfums et aux griffes d'araignées. A Vermillion Sands, on joue, on souffre et on s'ennuie. La lassitude balnéaire emporte et efface les moindres mouvements de l'âme, il ne reste plus qu'à s'allonger à l'ombre d'une terrasse de béton blanc, commander un crystal cocktail, attendre que la saison revienne, que les touristes reviennent, que revienne cette beauté conduisant une voiture aux lignes pures sur l'autoroute de Red Beach à Lagoon West, laissant voler derrière elle une écharpe immense, un parfum de désir et de mort.

Tout est déjà écrit, tout passe, Ballard lui-même a couché sur le papier ses souvenirs des années 70 dès les années 50, fondant un de ces mouvements littéraires dont Vermilion Sands a le secret, l'anticipation inversée. Il paraît que Ballard est mort, en vérité il s'ennuie encore, vêtu d'un costume blanc, en compagnie de Raymond Mayo, assis à là terrasse d'un hôtel aux lignes abstraites, autour d'eux volent des libellules aux yeux de cristal.


Nous n'irons pas à Vermilion Sands.


Le livre de J.G. Ballard a été remarquablement (ré)édité par les éditions Tristram.

3 commentaires:

  1. DERNIÈRE HEURE: Les ayants-droits de l'auteur s'étant opposés à la publication du "Labyrinthe Hardoon", l'un des inédits du recueil, cette édition ne sera plus disponible que d'occase. Les mêmes personnes ont empêché ("à temps", de leur point de vue) la réédition du Vent de nulle part chez un autre éditeur. Comprenne qui pourra.

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  2. @Anonyme : intéressant, d'où tenez-vous cette information ?

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  3. Tiens, me voici curieusement satisfait d'avoir le livre puisqu'il se retrouve censuré...

    Mais je n'ai pas réussi à y accrocher. Je ne sais pas pourquoi: je me rendais bien compte de l'originalité de l'approche (même 50 ans plus tard), des belles images de statues chantantes ou de maisons émotionnelles, etc. Après 5 ou 6 nouvelles, impossible de trouver l'énergie d'enchaîner avec les suivantes, même en m'y tentant plusieurs fois.

    Je n'ai guère d'explication...

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