12 septembre 2014

Ms Peregrine et les enfants particuliers - Ransom Riggs

Jacob est un adolescent américain "normal" vivant en Floride, qui adore les histoires bizarres que son grand-père, réfugié juif, lui racontait au sujet de sa propre enfance dans le pays de Galles. Grandpa avait des amis fantastiques (des enfants magiques, capables qui de voler, qui de cracher des abeilles), il vivait avec eux sous la direction d'une certaine Ms Peregrine dans une maison merveilleuse, toujours ensoleillée, mais il affrontait également des monstres étranges et terrifiants... En grandissant viennent les déceptions : Grandpa était surtout un fameux baratineur. Et voilà, alors que Jacob a 16 ans, que Grandpa meurt, brutalement. Jacob a vu/croit avoir vu quelque chose terrifiant... Bouffé de cauchemars, suivi par un psy, Jacob fini par se rendre en compagnie de son père sur l'île galloise où son grand-père prétendait avoir passé son enfance. Le voyage sera bien sûr très décevant... jusqu'à ce que...

Voilà un joli livre ! Le travail éditorial est soigné, l'objet est beau, parsemé de vieilles photos et cartes postales bizarres dénichées par l'auteur, qui accompagnent le récit. On aime le tenir, le parcourir, le lire. Le début est très prometteur, les deux premiers chapitres accrochent bien, l'ambiance bizarre de la vie de Jake en Floride est bien rendue. Puis, plus le livre avance vers son sujet (Ms Peregrine et les enfants particuliers, c.f. le titre), plus il est raté.


Les bonnes idées sont pourtant nombreuses : le décor gallois, les freaks, le cadavre dans la tourbe, la boucle, la confiance qu'on accorde aux récits de famille, etc. Et presque chacune est gâchée par un manque de suivi des thèmes et une technique narrative vraiment faiblarde (et je ne suis pas un défenseur à tout crin des romans hyper-construits, loin de là !).
La principale faiblesse de ce roman est d'être une allégorie. Enfants particuliers=juifs, estres=nazis, etc. Puisque c'est une allégorie, tout l'aspect imaginaire et merveilleux est bancal. L'auteur aurait dû soit assumer le côté féérique (et dans ce cas aller bien plus loin dans le bizarre et cesser de chercher des justifications pseudo cohérentes à tout bout de champ), ou assumer la construction d'une fantasy  40's, mais dans ce cas construire un univers imaginaire autrement plus riche que le pauvre morceau qu'il nous livre (les méchants sont méchants et ils veulent dominer le monde, bon, certes). Par exemple : à aucun moment, le fait que les enfants aient 90 ans n'est vraiment assumé, alors qu'il aurait fallu soit l'ignorer, soit en tirer des développements narratifs.
Dommage, parce qu'on croit aux personnages... dans les premiers chapitres. Et que la question de la confiance et du doute dans la relation parents-enfants (ici, entre le grand-père, le père et le fils) est passionnante et, ici, traitée sans finesse.
Quant aux cartes postales... on comprend qu'elles aient interpellé l'auteur. Mais deux fois sur trois on sent le texte un peu tordu pour pouvoir insérer la carte. Et l'explication narrative que donne l'auteur sur les gens apparaissant sur les images me semble toujours plus faible que ce qu'a dû être la réalité derrière elles... Le procédé atteint donc vite ses limites.


On a là un roman honnête, bien travaillé et intéressant, qui vise assez haut et n'a malheureusement pas du tout les moyens de ses ambitions. On comprendra que les nombreuses critiques enthousiastes présentes sur le net me laissent perplexe.



1 commentaire:

  1. Sur l'utilisation des cartes postales... L'anti-Sebald, en quelque sorte.

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