Je continue donc mon marathon Peeters, avec quelque chose de tout à fait différent. R.G. est une adaptation et une scénarisation par Peeters de récits que lui a fait Pierre Dragon, policiers aux renseignements généraux, du temps où cette très française institution existait encore.
Dans les deux volumes que j'ai lus (y en a-t-il d'autres ?), on suit deux enquêtes de Pierre Dragon et de ses collègues, qui, dans le premier, enquêtent sur des trafics internationaux (sweaters, limousines, chauffeurs), et dans le second sur la traite d'êtres humains.
Une fois de plus, le dessin de Peeters est remarquable, collant en finesse aux personnages, aux ambiances. On étouffe dans la camionnette de surveillance, on se cogne dans les petits bureaux, on visite toutes sortes de milieux, échanges de vêtements fabriqués dans des sweat shops dans des banlieues anonymes, fêtes au Crillon, poursuite sur les toits de Paris. Le tout dans une ambiance classique et pas désagréable de polar à la française. Les auteurs prétendent que presque tout est vrai, sinon les détails, et on veut bien les croire. Certaines anecdotes sont vraiment drôles ou tragiques, c'est selon.
Ce que ça dit de notre monde, de sa criminalité compliquée, des liens qui s'étendent très vite au-delà des frontières, tout ça est à la fois fascinant et effrayant, et cohérent avec ce qu'a pu me raconter un ami qui gravite dans un milieu similaire.
Je le redis, même si je n'ai pas tellement aimé ses histoires de SF, Frederik Peeters a un talent étonnant à rendre les échanges humains, regards, attitudes, sourires en coin, menaces... Tout sonne juste.
Bref, une bonne lecture, que je recommande (chaque volume se tenant assez bien tout seul, narrativement parlant).
Avec un peu de recul, on sent Peeters très intéressé par les personnages d'hommes. Trentenaire looser dans Lupus, quarantenaire divorcé dans Aâma, et balaise super-viril-mais-sensible dans R.G. (divorcé aussi). Le traitement dans R.G. des ambiances de vestiaire, amitiés sincères mais pudiques, blagues un peu lourdes entre mecs et envies de bagarre me semble juste, même si, je l'avoue, c'est un cadre où je ne me sens personnellement pas très à l'aise.
Dans ses récits, les femmes me semblent être des personnages externes, un peu extra-terrestres et bizarres, qui vont sur leurs propres orbes et dont les rencontres avec l'Homme sont souvent explosives.
Et non, malheureusement, pas de suite au-delà de ces deux volumes, et aucune chance qu'il n'y en ait jamais. Dragon racontait ses anecdotes à Peeters. A partir de ses notes, Peeters créait la mise en page, définissait l'ambiance graphique, choisissait les dialogues, dessinait l'ensemble. Bref, il faisait 98% du travail. Quand Dragon a commencé à se considérer comme un authentique co-auteur (je ne sais pas exactement comment ça s'est traduit), Peeters en a été irrité, et a tout simplement décidé d'arrêter. Peeters explique aussi que le projet ne lui était pas une envie personnelle, venant de Sfar et de son très fort pouvoir de persuasion ; c'est aussi ce qui rendait facile à FP d'arrêter.
RépondreSupprimerPour les femmes, as-tu tout simplement lu Pilules Bleues? Après tout, c'est le texte qui m'a convaincu de suivre Peeters depuis 20 ans. Je me demande ce que j'en penserais si je le relisais aujourd'hui. Je suis curieux d'avoir ton avis.
(Ah oui: RG, c'était quand même super!)
Je vais jeter un coup d'oeil à Pilules bleues, et au western dont m'a parlé l'ami Léo.
RépondreSupprimerIl est très clair, à la lecture, que Peeters a fait l'essentiel du boulot. La scénarisation des livres, leur équilibre interne, etc, sont très réussis. Très bon travail de retranscription de témoignages.