30 septembre 2019

Cléo de 5 à 7 – Agnès Varda

Nous n’avions jamais vu de film d’Agnès Varda.
Dans celui-ci, on suit en quasi temps réel Florence, dite « Cléo », la vingtaine, starlette de la chanson yéyé, à travers Paris entre cinq heures et sept heures, le 21 juin 1961.
Cléo est angoissée, elle attend le résultat d’un examen médical qui peut faire basculer sa vie. Cléo a peur de la mort.
On va la suivre dans les rues de Paris, chercher du réconfort auprès d'amis plus ou moins solides et fiables. Dialogues naturalistes, chansons, DS, clopes, drague à l’ancienne (« alors, on se promène ? », « vous habitez chez vos parents? »), Cléo a tout ce que je pourrais détester dans un film français/parisien, mais est en vérité un excellent film, magnifiquement tourné, monté, joué, intelligent et subtil de bout en bout. Un des plus beaux films de femme sur les femmes que j’aie jamais vu, précis, doux et fragile. Une merveille de pur cinéma.








28 septembre 2019

Drôle de jeu – Roger Vailland


Je suis dans une période résistance/seconde guerre mondiale, et drôle de jeu est un drôle de livre pile dans la cible. Vailland a écrit ce roman, nourri de souvenirs de résistance, pendant les années 44 et 45 et l’a publié juste après la guerre. C’est un roman français, mettant en scène un journaliste parisien la quarantaine, pas mal porté sur les femmes (et la drogue, et plein d’autres choses), qui bosse trop, fait la fête et et drague une étudiante qui a vingt ans de moins que lui. Le tout bien écrit et plein de traits d’esprit.
On dirait donc que ça ressemble à une sorte de roman parisien caricatural, et c’est assez vrai. Sauf que le boulot du héros, Lamballe, est de coordonner des réseaux de résistance, qu’il mène une vie clandestine, qu’il travaille à essayer de faire libérer un opérateur radio… et que le tout est un véritable roman (l’histoire a la construction et les enjeux d’une fiction), avec un début, un milieu et une fin. Vailland y parle de la résistance avec une très grande liberté de ton, sans la sanctifier ni la diaboliser. La résistance, l’animation de réseaux, le financement de complices, la manipulation de fonctionnaires ou d’agents d cela SNCF, tout ça est un métier, avec ses routines et ses dangers, le tout très bien rendu. Bien sûr une partie des éléments sont vrais (je soupçonne que les portraits sont tracés d’après nature, pour la plupart), mais, en tant que roman, drôle de jeu est sans doute une des sources les plus vraies pour savoir ce que vivait un cadre de la résistance à Paris.

D’ailleurs, Daniel Cordier (le secrétaire de Jean Moulin) a choisi de publier ses mémoires sous le titre Alias Caracalla. Caracalla n’était pas son pseudo dans la résistance : c’est le pseudo que Vailland lui a inventé dans drôle de jeu !

26 septembre 2019

Player One - Ernest Cline

Je parle ici du livre, pas du film de Spielberg (pas vu).

Dans un futur déglingué, toute la planète est connectée à l'OASIS, système de réalité virtuelle du feu de Dieu, mélange d'Internet complet de MMORPG multi multi mondes. Le créateur de l'OASIS, Halliday, un génie croisement entre Steve Jobs, Bill Gates et Spielberg et Gygax, vient de mourir en indiquant qu'un Easter Egg était caché dans les milliards de mondes de l'OASIS et que celui qui le trouverait prendrait le contrôle de la société OASIS, et donc du monde... Et pour trouver cet "oeuf", il faut plonger dans l'univers mental années 80 de Halliday, séries télé, films, livres de SF et de Fantasy, musique...
Wade, le héros, est le tout premier a trouver un indice utile dans la quête de l’œuf. Contre lui, des milliers de concurrents et toute la horde des sixers, les méchants chasseurs pros payés par la méchante compagnie de télécom qui veut prendre contrôle de la trop cool OASSIS.
L'idée de base est marrante, pitchable en quelques mots et attirante. Toute la partie hommage aux années 80 est assez réussie, elle permettra aux ados blancs à lunettes des années 80 (donc les gens au pouvoir maintenant, rappelons-le) de reconnaître des signes culturels qui feront tilt.
Après ça, le livre se déroule comme un scénario hyper balisé de jeu vidéo. Il y aura trois clefs, trois portails, des retournements finaux, exactement comme vous pourriez le prévoir.
(au bout de cinquante pages, posez le livre et planifiez le scénario en vous appuyant sur les clichés et les effets les plus attendus : ça va se passer comme ça).
L'auteur s'efforce de décrire la tech et la société du futur, avec des idées marrantes (appareils haptiques, servage pour dettes...) qui malheureusement ne tiennent pas debout. Le côté le plus déplaisant du bouquin étant cette vision du monde de petit garçon qui, si elle est acceptable dans les films des années 80 (les goonies...) parce qu'à l'époque elle illustrait un point de vue original, ne l'est plus maintenant où elle doit au moins être un peu critiquée. L'auteur s'en rend d'ailleurs compte et essaie de corriger le tir, avec maladresse (l'identité de Aech, par exemple).
Un autre truc frappant : l'incapacité de l'auteur à penser le collectif, la société. On est en fait dans ce monde vieillot où le petit garçon héros tout seul surmonte toutes les difficultés...
Quelques livres mieux faits, sur des sujets voisins:
Le sauveur de l'humanité, c'est toi (Terry Pratchett), évoque de bien meilleure manière le jeu vidéo à l'ancienne et comment il permet à un jeune garçon de supporter un monde de merde (la banlieue anglaise des années Thatcher).
Mowenna, de Jo Walton, que j'ai lu à sa sortie et pas chroniqué, un beau portrait de jeune femme à travers ses lectures de SF.

Alors, avec tout le mal que j'en ai dit, Player One est-il bon à jeter ?
Même pas : c'est un bouquin distrayant, l'hommage aux années 80 est assez savant (même s'il ne m'a pas impressionné), et si on veut une histoire tadam ! qui mêle cyberpunk et jeu vidéo, on pourra y trouver un certain plaisir.


29 août 2019

Citoyens clandestins - DOA

J’avais déjà lu un roman de DOA, par la bande, celui qu’il a co-écrit avec Dominique Manotti. Citoyens Clandestins est un gros roman noir, mettant en scène dans la France de 2001 (celle d’un Internet sans Facebook, des téléphones portables sans écrans tactiles et de l’ambiance post 11 septembre) une apprentie journaliste, un agent arabe infiltré dans les « milieux islamistes », un super agent en roue libre travaillant de loin pour la DGSE et un paquet de policiers, musulmans radicalisés, etc, etc.
C’est bien arrangé, l’intrigue (centrée autour d’un attentat en France) fonctionne bien, la connaissance par l’auteur des mécanismes policiers et administratifs et journalistiques m’a bien plu. DOA est sérieux, n’en fait pas trop dans le sexe et la violence et le roman n’est pas trop pessimiste (si, si). C’est quand même une histoire de mecs qui en ont : je n’ai pas été très convaincu par la peinture des femmes.
Le plus intéressant de ce livre est révélé par son titre : ce qui intéresse DOA, au delà de son intrigue, c’est la peinture de la vie de gens qui, tout en vivant « parmi » nous sont en fait en parallèle de la société : wannabe terroristes, agent infiltré, agent secret. Le roman est aussi, assez curieusement, un roman de super héros (Lynx est une forme de surhomme avec identité secrète) et cet aspect l’a rendu touchant à mes yeux, par la construction assumée d’un fantasme au-dessus d’un récit réaliste.

27 août 2019

Twlight I – Catherine Hardwicke

J’ai regardé une heure de ce film adapté du fameux bestseller de Stephenie Meyer. Après, j’ai craqué. L’ensemble continuera donc à m’échapper, et ce n’est pas trop grave.

26 août 2019

Scènes du chapiteau 2019




Même si je n'en parle pas chaque année, le festival a toujours lieu, le dernier week-end des vacances scolaires (en Suisse). Trois jours de fête magique dans ce creux de verdure, avec les lampions, les constructions en bois, les enfants qui courent partout jusqu'à ce que la nuit devienne très noire, et les concerts et les spectacles. Les Scènes du chapiteau c'est notre festival, par ce qu'on y retrouve tous les copains du village, et des gens qui viennent de loin (amis, amis d'amis venus donner un coup de main pour assembler les structures temporaires) et d'encore plus loin (migrants en demande d'asile venus avec leur énergie et leur bonne humeur). C'est un moment tellement beau que si je voulais inventer une fête magique dans une histoire, je ne saurais que refléter ces mémoires là, c'est tellement beau que rien qu'à évoquer ce souvenir (c'était hier ! seulement hier !), j'ai envie de pleurer d'émotion.


Comme les enfants grandissent, on y reste plus longtemps. Du jeudi soir au dimanche, à la toute fin, pour les dernier applaudissements dans un très beau crépuscule d'été - troisième vague de chaleur sur l'Europe de l'année selon la NASA.
Un tout petit festival écolo, où l'on mange bien, où on boit local, où les musiciens viennent de tout près comme de plus loin. Cette année, j'ai pu écouter plus de concerts, voir plus de spectacles que d'habitude, et je vais tenter d'en dire ici quelques mots, pour un peu plus de souvenirs.



Jeudi soir, nous avons écouté Alfabeto Runico, formation italienne violon/voix plus deux contrebasses. Les chansons des Pouilles étaient réussies (avec de belles orchestrations), le reste marchait moins bien.


Vendredi après midi, un groupe sans nom nous a joué un répertoire sympathique à la Nick Cave. Dommage que le violon ait eu si peu de son.




Vendredi soir, Lada Obradovic Project, un ensemble jazz moderne autour de la batteuse serbe Lada Obradovic. Un moment exceptionnel ! Une musique de chocs, de ruptures, un écho de notre temps.

Samedi j'ai eu un aperçu d'à peu près tous les concerts, même si je n'ai pas pu les écouter tous en entier. Un des plaisirs de faire les présentation est de pouvoir échanger quelques mots avec tous les artistes.



On a commencé avec le Bric à brac orchestra : chansons à jeux de mots dans l'esprit de Boby Lapointe et instruments bricolés. De beaux moments de jeu et de poésie.


Puis j'ai eu quelques aperçus du spectacle Bivouac de la compagnie Matita, dans la forêt.


Nous avons ensuite enchaîné avec un très beau concert de l'ensemble Quatro Vozes autour des compositions d'Edgberto Gismonti, une musique sophistiquée, entre classique et jazz, construite autour de la guitare à six comme à dix cordes. Les musiciens avaient un jeu exceptionnel de précision.

J'ai aperçu des moments du spectacle Itinérances de la compagnie Muances, mêlant danse, violoncelle, jeu théâtral.


Du concert d'Alexandre Castillon et les bookmakers (accompagné à la viole de gambe) je n'ai entendu que la belle reprise de Brassens du rappel.


Au crépuscule, sur la petite scène bleue, a joué un très énergique trio blues venu de Montpellier, My Joséphine, autour de la chanteuse Bett Betty. Ca envoyait du bois !





Puis mon moment préféré du week-end, le concert de No mad ? Cabaret fantastique, interprétant leur spectacle Idomeni. Une magnifique présence scénique, de beaux textes, un univers puissant... Nous avons adoré.




Enfin, dans la nuit tombée, le bateau s'est élancé sur les musiques atmosphériques d'André Losa pour un moment de magie pure.




Avant que la nuit se conclue sur un énergique concert du Barcelona Gipsy BalKan orchestra.

Le dimanche est toujours une journée un peu étrange. L'été, les vacances, le festival se terminent. 


Nous avons eu la chance de re-voir les Colporteurs de rêves, un duo-trio entre cirque et chanson qui déploient une énergie de folie pour un spectacle très drôle, social et réflexif qui s'adresse à tous les âges.


Le festival s'est terminé avec un concert des Zézettes Swing (devenus Bleu Amarante), du néo-Swing 30s-50s plus vrai que vrai avec des compositions au discours écolo sur un ton léger, entre revival Django, triplettes de Belleville et petites touches de Louis Armstrong. Une belle conclusion pour un grande édition.

Image











Finding Neverland – Marc Forster

Vu peu de temps après Miss Potter, un autre biopic en costumes sur un créateur pour enfants des années 1900. Cette fois-ci, meet J.M. Barrie, joué par Johnny Depp (l’acteur favori de la population de moins de douze ans de notre foyer), avec Kate Winslet dans le rôle de Sylvia Llewelyn Davies.
C’est compassé comme il faut (moins que Miss Potter), victorien comme il faut et ça raconte une histoire d’amour sage comme l’époque pouvait en créer. Johnny s’en sort bien pour créer le personnage lunaire de J.M. Barrie. Kate Winslet est très bien aussi. Le film donne une idée de ce qu’a pu être la pièce de théâtre Peter Pan.
Le scénario est juste assez exaspérant dans sa tentative de montrer que toute l’histoire de Peter Pan s’explique par la vie et l’expérience personnelle de Barrie. Pour un film qui ne parle que d’imagination, être aussi faux sur l’acte de création est un peu lassant. Le film reste agréable à regarder toutefois.