26 octobre 2009
Small World - Martin Suter
22 octobre 2009
Jérusalem au poker - Edward Whittemore
Ils te diront tous la même chose, et sans hésiter un seul instant. Nous continuons à vivre dans la vie des autres, et il n'y a aucune fin en vue, c'est sûr.
Je cite Joe O'Sullivan Beare parce que cet Irlandais bavard dit les choses mieux que moi, et je n'ai pas grand chose à ajouter après avoir lu Jérusalem au poker. J'en ai trouvé le début un peu laborieux car reprenant trop de choses du premier volume. Et j'ai profondément aimé le livre dès que Nubar Wallenstein, pathétique fasciste de château hanté, est entré dans la danse. Bombastus Von Paraheim Ho ! Obsessions alchimiques, maladies hyrdrargiques, uniformes noirs, princes afghans décadents, tonnelets de raki à la mûre, réunions maçonniques souterraines, reine du consortium du pétrole, assise sur un tapis volant, posant sa main noire sur les champs pétroliers du moyen-orient (madame sept pour cents).
Avec Joe et Cairo, j'ai passé Noël en buvant du champagne et mangeant des homards, sur les toits de Jérusalem. J'ai écouté un noble japonais sioniste jouer de la musique traditionnelle au monastère Sainte Catherine du Sinaï, accompagné par un violoncelle yiddish venu de Hongrie. J'ai traversé un palazzo vénitien tellement pillé qu'il ne restait plus que la brume pour soutenir l'intérieur de ses façades. Strongbow Plantagenet et Menelik Ziwar, les deux bons génies, Stern, le trafiquant d'armes devenu un des noms de Dieu, et tous les fous, tous les insensés, tous les conteurs, tous ont commencé à devenir des mythes.
Le quatuor de Jérusalem engendre ses propres mythes, c'est un vertige.
Je le dis avec les autres , si vous croyez à la force des livres, lisez-le.
19 octobre 2009
Abraham au collège de France
Je partage ici mon second coup de cœur parmi les podcasts du collège de France : le cours sur la construction d’un ancêtre – la formation du cycle d’Abraham, du professeur Thomas Römer.
Thomas Römer est un orateur brillant, qui parle avec rigueur et humour de la façon dont s’est constitué le cycle d’Abraham dans le livre de la Genèse. Son cours est une très belle initiation à la façon dont on aborde scientifiquement les textes bibliques de nos jours.
Le cycle d’Abraham contient nombre de passages très intéressants et souvent mystérieux :
- La “vente” de Sarah au pharaon par Abraham en Egypte.
- La naissance d’Ismaël et du peuple arabe
- Le cycle de Loth et la destruction de Sodome et Gomorrhe
- la visite des trois-anges-qui-sont-un à Abraham et Sarah, le rire de Sarah.
- La naissance et le sacrifice d’Isaac…
Attention, ce cours n’est pas un cours d’exégèse chrétienne ou rabbinique (même si les exégètes, qui lurent et lisent encore ces textes avec une immense attention, sont souvent cités). On cherche surtout à comprendre les textes : qu’est-ce que les auteurs ont voulu dire, comment s’y sont-ils pris, que pouvait signifier tel ou tel passage, pris dans le contexte de l’époque de rédaction ?
Pour cela, le professeur s’appuie sur les textes bibliques eux-mêmes, sur les textes contemporains (assyriens, babyloniens, égyptiens…), sur les découvertes archéologiques…
La thèse de Thomas Römer, concernant Abraham, est que ce personnage – image même du migrant en route vers la terre promise par Dieu – est en fait un personnage autochtone (de Palestine). La tradition orale de ses aventures (en Egypte, avec son frère Loth…) aurait été reprise par des rédacteurs postérieurs à l’Exode pour en faire une anticipation et un récit parallèle à celui de Moïse, illustrant une des tensions présentes dans le judaïsme : en opposition à l’exclusivisme de l’Exode (qui insiste sur ce qui distingue et sépare le peuple juif des autres) on voit là une vision des juifs comme peuple parmi les autres, devant conclure alliance et traités avec eux.
Il s’intéresse au texte dans tous ses détails, étudiant les genres littéraires (par exemple, les récits de naissances annoncées par Yahvé), les récits qui se répètent (on trouve trois fois dans la Genèse le même récit du patriarche – Abraham ou Isaac – vendant sa femme à un roi étranger), aux contradictions sur les âges des personnages, sur les agencements des évènements… Il souligne aussi la poésie, les jeux de mots (en hébreux of course), l’humour des textes vis à vis de leurs personnages.
Une très belle découverte pour moi, et un cours passionnant.
09 octobre 2009
Le graal au collège de France
L'écoute de podcasts est une sorte de drogue, qui a quasi complètement remplacé l'écoute de mon poste de radio. Parmi mes heureuses découvertes, les podcasts du collège de France.
Petit rappel sur le collège de France : il s'agit d'une institution remontant à 1530, où enseignent certains des savants français et étrangers les plus respectables de leurs domaines. Quels domaines ? Un peu tous, en fait : paléontologie, physique, histoire, littérature...
On peut regarder et/ou écouter à peu près tous les cours gratuitement. Et comme ce sont des cours magistraux donnés par des gens qui connaissent un peu leur sujet, c'est un vrai bonheur.
Mon premier grand plaisir, je l'ai eu avec le cours sur les quêteurs du graal, de Michel Zink.
Durant ces neuf heures de cours magistral (que j'ai écoutées en faisant la vaisselle, en programmant, ou le matin vers 6h30 en attendant mon bus), on étudie un certain nombre de questions intéressantes, comme :
- de quoi parlent (vraiment) les romans de graal, que ce soit celui de Chrétien de Troyes, de Wolfram von Eschenbach, ou des différents continuateurs plus ou moins heureux du filon ?
- Est-ce le graal est : une coupe, une pierre précieuse, un ostensoir, un plat à viandes ?
- Pourquoi est-ce que les auteurs ont autant de mal à finir les livres qui parlent de la quête du graal ?
- Pourquoi est-ce que le graal doit être découvert et gardé par des chevaliers ?
- Saint Bernard de Clairvaux croyait-il vraiment à une forme de chevalerie chrétienne ?
- Faut-il marcher pour trouver Dieu ?
- Les moines ont-ils le droit de partir en pélerinage ?
- Comment se fait-il que la prequels et sequels des romans du graal me fassent autant penser à certains usages contemporains en littérature ?
- Joseph d'Arimathie était-il un chevalier médiéval ?
- Que raconte le Perlesvaus, roman médiéval formant une sorte de reprise gore de l'histoire de Perceval ?
- et plein d'autres choses...
Attention, pour les amateurs d'ésoterisme, de Rennes le château, de complots templiers, etc, le cours ne parle pas du tout de tout ça. Seulement du graal dans la littérature médiévale. Et c'est déjà pas mal. Et même avec une culture très superficielle du sujet, comme la mienne, ça reste tout à fait accessible.
On pourra trouver ces podcasts sur l'iTunes store, ou bien ici:
http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/lit_fra/audio_video.jsp