11 octobre 2012

Oust ! – au petit théâtre



Boum, dans le noir quelque chose s'écrase sur le sol. La clown verte, car c'est elle qui vient de tomber, se redresse avec sa petite valise au milieu d'une curieuse prison faite de bâtons de mikado géant. Qu'elle tente de mettre un pied dehors et les lumières sonnent l'alerte, elle est coincée. Bientôt, une autre chute, une autre clown, une autre valise...
Avec ses errants en cavale pourvus de leur bagage, méfiants, soupçonneux, maintenant l'autre derrière les barrières de la politesse, le spectacle aborde des sujets pas faciles pour des petits enfants, mais la mise en scène, les maladresses burlesques, les jongleries ratées et les ballets de travers, font tout passer, tout admettre. On a parfois peur, on rit, on s'émerveille jusqu'à la chute, d'une grande douceur.

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10 octobre 2012

L'ombre du vent – Carlos Ruiz Zafon

J'ai passé un long moment à la lecture de ce roman et un j'ai laissé passer presque autant de temps avant de le chroniquer, ainsi son souvenir se fond dans une sorte de brume rêveuse qui ne lui sied pas mal. Le héros, Daniel, vit dans la Barcelone franquiste de l'après seconde guerre mondiale. Il est fils de libraire, se rêve sans doute écrivain et met la main sur le dernier exemplaire du roman l'Ombre de vent, de Julian Carax, mystérieux écrivain des années 30. Le roman nous conte une initiation à l'amour, à la littérature et au mystère, avec des intrigues emboitées, des enquêtes, des récits dans le récit, des révélations et des contre-révélations, sur un ton volontairement romanesque, fantastique et mélodramatique, le ton justement des romans de Julian Carax. Livre sur les livres contenant des livres, où toutes les femmes sont belles, tous les amants maudits et toutes les trognes singulières, l'Ombre du vent procure un sentiment de détachement étrange et doux et laisse des souvenirs troubles.

09 octobre 2012

Le Président – à Vidy


Sous le chapiteau de Vidy (mais pourquoi là ? et pas dans la grande salle ?) on découvre le couple présidentiel qui vient d'échapper à un attentat. Lui se fait faire un massage par son masseur préféré qui lui raconte des histoires drôles. Elle, ébranlée, pleure la mort du colonel de la garde (un héros) et de son chien (un carlin). C'est Thomas Bernhard qui les fait parler et puisqu'on est chez TB, le discours va être un fleuve, un déferlement de pensées en tourbillons, de préjugés, de haines (contre les contestataires, les philosophes, les étudiants) mais aussi de mensonges et de nostalgies. Le flot emporte le spectateur, porté par deux acteurs excellents, elle, en figure déjà morte au visage blafard ou aux seins dressés de pin-up et lui tout en rondeur manipulatrice, porté par une mise en scène pleine de belles trouvailles, rideaux, marionnettes et coups de cymbales. Le spectateur encaisse, vacille, s'émerveille de cette plongée dans des psychés déviantes qui pourraient être la sienne propre. Âmes sensibles, s'abstenir.

L'ambition, la haine, toujours.



Photos (c) Loll Willems