L'idée du suicide embellissait ma vie...
Le pitch de la pièce est génial : Semione se réveille en pleine nuit, il est au chômage, il se dispute avec sa femme et lance que, quitte à mener une vie comme ça, autant mourir. Puis il sort. A partir de ce moment, elle est persuadée qu'il veut se tuer et va rameuter tout le monde pour l'en empêcher. L'idée, qui n'était pas présente dans la tête de Semia, fait son chemin, d'autant que le futur suicidé devient très courtisé pour toutes sortes de bonnes et mauvaises raisons... L'histoire se déroule dans la Russie post-révolutionnaire des années 20, pleine de paumés, de chômeurs, d'intellectuels réprimés. Derrière une comédie énorme, des gags en rafale, l'escalade de l'absurde, on voit s'agiter tout un peuple effrayé, replié sur lui-même. Et partout, tout le temps, au-dessus de tous ces gens plane l'ombre de la mort.
Malgré la célébrité d'Erdman, malgré les plus hautes recommandations, la pièce datant de 1928 n'a jamais pu être montée avant 1990 en Russie. Tout dictateur bien éduqué aurait immédiatement envoyé en exil en Sibérie un satiriste pareil. Staline ne s'en est pas privé.
La mise en scène de Patrick Pineau est énergique et dynamique gardant bien présents les différents tons de la pièce de la grosse rigolade à la peur grinçante. C'est un théâtre du corps et des postures, à la façon de la Comédie Française, comme j'adore. Les différents acteurs se donnent à fond, notamment Patrick Pineau lui-même dans le rôle de Semione Semionovich Podsékalnikov, mais aussi Anne Alvaro dans le rôle de la belle-mère, Sylvie Orcier dans celui de Maria et l'extraordinaire coursier Iégorouchka, interprété par Manuel Le Lièvre.
il n'y aura plus de femmes (oooh),
plus d'hommes (oooh),
seulement...
des masses.
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