19 mars 2012

Limonov – Emmanuel Carrère


J'ai coutume de commenter les livres à chaud, sans grand recul, pour tenter de garder quelque chose de leur impact (quand il y en a un...). Celui-ci aura des conséquences, dans des directions sans doute inattendues. Je l'ai fini aux petites heures, très secoué.


Limonov est une biographique/chronique de la vie d'Edouard Salenko, dit "Limonov", poète,  rebelle, écrivain, valet de chambre, petite frappe, chef de parti politique, journaliste, aventurier russe de la fin du XXème siècle et du début du XXIème (puisqu'il est encore vivant, et actif). Ce livre est fascinant, par ce qu'il raconte : la vie folle d'un étrange sale type sympathique, héros ambigu, dans des temps et des terres étranges, notre temps, notre monde. Fasciste ? Heureux de l'être, merci. Un type égoïste, séducteur, brûlant, jamais indifférent. Rien que pour ça, pour cette ligne ardente découpée au cutter dans notre réalité, qui en révèle les étrangetés et les horreurs, on peut lire ce livre.
J'aime la fiction, l'imagination qui dit la vérité, les mensonges et les histoires inventées. Ce livre en est l'opposé. Il n'y a pas là de style poétique, de lyrisme ni de romantisme, juste une narration brève, allant droit aux faits, rendant compréhensibles les mondes les plus distants, de l'URSS brejnevienne en passant par New York dans les années 70, les camps de travail contemporains, la politique russe actuelle. C'est du journalisme ? Peut-être, mais alors le meilleur, avec une intelligence aiguë de son sujet et de la manière dont celui-ci est, par son étrangeté et son opposition, un révélateur des temps.
La fin est bouleversante, par sa cruauté et sa tendresse.
Je crois que les auteurs doivent aimer, sincèrement aimer leurs personnages, jusqu'au bout. Dans ce registre, Emmanuel Carrère ne m'a pas déçu.

Allez voir sur le site de Jeremy Nicholl pour une série de photos assez frappantes, c'est rien de le dire.




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