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02 avril 2018

Compte-rendu du rejeton d'Azathoth – Partie 5

I was old when the Pharaohs first mounted
The jewel-deck’d throne by the Nile;
I was old in those epochs uncounted
When I, and I only, was vile;
And Man, yet untainted and happy, dwelt in bliss on the far Arctic isle.

Oh, great was the sin of my spirit,
And great is the reach of its doom;
Not the pity of Heaven can cheer it,
Nor can respite be found in the tomb:
Down the infinite aeons come beating the wings of unmerciful gloom.

H.P. Lovecraft – Nemesis

Pour retrouver les épisodes précédents et les explications sur ce compte-rendu, lire dans l'ordre chronologique les billets marqués Azathoth.

Après un peu moins d’un an de jeu, nous voici arrivés à la fin de cette campagne. Vous trouverez dans ce billet un résumé de la fin des aventures d’Olga Passelova-Baxter et d’Abraham Monroe et de leurs compagnons.
Cette campagne a été une très bonne surprise. Malgré son côté très « classique » dans sa facture, elle offre de très belles potentialités d’histoires, avec nombre de bonnes situations à la Tintin (exploration sous-marine, le Montana sauvage, le voyage au Tibet), assez faciles à faire tenir autour d’une belle unité thématique et très lovecraftienne. Elle demande un peu de boulot d’adaptation et d’appropriation mais je la recommande chaudement.


Francis Wilson est parti en expédition en Russie, puis vers le Tibet. Pourquoi ? Que veut-il ? Il n’a laissé aucune indication, pas même à la comtesse Efremia Passalova, la mère d’Olga, chez qui il a séjourné quelques jours.
Olga part donc vers Paris avec Gabrielle, sa nouvelle dame de compagnie (recrutée en remplacement temporaire d’Adèle). Arrivée dans la ville lumière, elle s’inscrit à un cours de Tibétain aux Langues Orientales, se rend compte que ça ne la mènera nulle part et finit par recruter le père Bernard Lepartmentier, Dominicain, anthropologue, polyglotte et grand voyageur vers l’Asie, ravi de trouver une riche mécène pour financer un nouveau voyage vers son cher Tibet.
Elle croise aussi madame Fanny Bullock Workman qui sympathise avec cette « jeune russe énergique » et lui donne d’excellents conseils pour une expédition d’alpinisme moderne : recrutez des guides expérimentés, achetez le meilleur matériel (européen). Olga ignore encore l’influence que cette rencontre aura sur sa vie future.
Olga rassemble donc une équipe: outre le fidèle Volodia et le père Leparmentier, elle voyagera avec deux guides de haute montagne savoyards: Joseph Vouilloz, 45 ans, très expérimenté et Etienne Ferat, 22 ans, à la condition physique exceptionnelle. Elle envoie également un télégramme à William Harding, le journaliste new-yorkais, au cas où il voudrait chroniquer l’expédition. On se rappelle que Harding avait été très impressionnée par ses rencontres avec la « dame des étoiles », comme il l’avait surnommée. Il accepte.

Le voyage vers l’Orient lointain implique un retour en Russie : Olga retrouve Petersbourg, son exubérante mère, la haute société et les services secrets du Tsar qui l’interrogent sur ce retour et sur ses anciennes activités. La pression sociale est forte sur la jeune noble: il est temps de se marier. Sa mère a un candidat sérieux (et ennuyeux), l’Impératrice en a un autre. Et derrière l’impératrice, on devine les manoeuvre de son éminence grise, Raspoutine.
Car le starets pétri de visions a fait des rêves. Cette femme ne doit pas continuer ses voyages. Elle doit rester à Petersbourg. Olga voit le piège se refermer lentement: festivités, bals et beau mariage: dans quelques semaines, à peine, elle sera une épouse sujette de son mari, le comte Hoffmansthal, un Allemand proche de la cour impériale, bon danseur, bon chasseur riche et autoritaire.
Une nuit, en secret, Olga s’enfuit. Un traineau filant sur les lacs gelés, conduit par Volodia. Un mot laissé aux Savoyards, à Leparmentier et à Harding : rendez-vous à Pichkek, au Kirghizistan. Un télégramme identique envoyé à Monroe et Adèle: rejoignez-moi à Pichkek. Olga.

Commence alors la partie la plus solitaire des aventures de notre héroïne. Sans bagages, sans femme de chambre, munie seulement de ses bijoux qu’on écoulera de loin en loin, Olga file en traineau, en voiture, en train, à cheval, devant la police secrète. Elle fait un détour par un certain camp de prisonniers aux confins de l’Oural et, jouant d’audace et de corruption, libère Sascha Leontiev, médecin juif socialiste, son ancien amant, qu’elle entraîne avec elle. (On recrute aussi une jeune paysanne taiseuse pour faire la cuisine et laver les vêtements.). Et, des semaines plus tard, on arrive à Pichkek.
Sascha, reconnaissant et troublé, encore secoué par l’emprisonnement dans les camps politiques du Tsar, s’établit comme médecin des pauvres et tente de renouer avec son ancien amour. Quant à elle, elle attend. Déjoue les tentatives d’agents du tsar pour l’arrêter, rassemble son équipe qui l’a rejointe, paye des chevaux, des guides, et l’on s’élance en mars-avril à l’assaut des plus hautes chaînes de montagne du monde, sur les routes du général Prejvalski et de l’oncle Adamski, par qui tout ceci est arrivé.

Car oui, Monroe a rejoint sa mécène, abandonnant ses recherches délétères à Arkham, à deux doigts de briser les secrets du livre d’Eibon. Il entraîne sa jeune épouse enceinte. Jusqu’à Paris, de là elle partira vers la Suisse et moi vers le Tibet. Mais Adèle, amoureuse, et mue par une intuition secrète, convainc son mari de rester un peu plus longtemps avec elle. Elle m’accompagnera jusqu’à Istanbul, pense Monroe. Jusqu’à Bakou, et pas plus loin. Jusqu’à Samarcande, puis retour ! Jusqu’à Pichkek et stop !
Adèle, à la santé vigoureuse, ne se plaignant jamais, en bonne Suissesse, se retrouve donc à cheval avec son mari qui se demande comment ils en sont arrivés là.

Dans l’ambiance nomade et virile de l’Asie Centrale, Monroe paraît être le chef de l’expédition. Il assume le rôle (et prend conseil auprès d’Olga). Les voici partis pour des semaines de voyage, à dormir sous la tente, sous la yourte, à travers les montagnes et les déserts, d’issik Kul à Kachgar, de Kachgar aux montagnes Tibétaines… On croise des Kirghizes, des Russes, des Chinois, des Ouïgours… On retrouve la trace de Wilson qui, forcé d’hiverner au Xinjiang, n’a plus que quelques semaines d’avance sur eux.
Chaque soir, Harding, converti à l’astronomie, déploie le télescope qu’il a fait équiper par Passelov des derniers « filtres », et cherche dans le ciel la trace de la comète noire, Nemesis. Car les calculs sont formels: d’ici à la mi-juin, l’astre véloce croisera l’orbite de la Terre. De cela, on parle peu. Mais certains des membres de l’expédition sont conscients que cette course insensée vers le mystérieux monastère de Leng est le dernier espoir (reposant sur quoi ?) de changer le destin du monde. Monroe a emporté ses notes les plus importantes dans une précieuse mallette accrochée aux flancs de son cheval.
(En route, chacun à leur façon, Harding et Sascha courtisent Olga qui leur accorde des gages égaux de son amitié)
La nuit, avant de s’endormir, Adèle prépare pour Olga des infusions légère de cette drogue que Baxter prenait avant de s’endormir. Au matin, Olga se rappelle d’étranges paysages, les rues d'Ulthar, la bibliothèque, le souvenir de son père...

On atteint enfin les hauts plateaux du Tibet. Tempêtes, avalanches, engelures… Comme provoquées sur leurs chemin par le même mystérieux fantôme qui les hante depuis le commencement. Olga découvre que le poignard tibétain pris il y a des années chez son Diadia peut avoir une influence sur cet être. Le contraindre à renoncer à son opposition. Voire obtenir son aide pour trouver son chemin à travers des cols escarpés…


Auprès d’un ermitage abandonné, on découvre le cadavre d’un Tibétain porteur d’une lettre désespérée de Wilson pour Olga. Craignant l’échec de son expédition, le linguiste envoie un message désespéré derrière lui, sans se douter que les secours sont si proches ! Une carte du plateau de Leng et du moyen de l’atteindre, des clefs pour comprendre le livre d’Eibon, une injonction à faire cesser les danses impies exécutées dans le monastère qui attirent vers la Terre la terrible Nemesis. 
Avec l’aide d’Adèle, dans les salles froides de l’ermitage, Monroe reprend ses études, comprend vaguement le sens de ces danses… Mais le temps presse, il faut reprendre la route. 

On traverse une jungle étrange. On affronte des araignées d’une race similaire à celle qui a empoisonné Baxter. Dans l’antre d’un monstre géant, tué par Volodia, le fidèle serviteur découvre le corps englué de Wilson. Le vieux professeur est vivant ! Il s’adjoint au groupe et l’on continue toujours plus loin sur les hauts plateaux. Le passage du dernier col est une épreuve terrible. Leparmentier renonce, Monroe contraint Adèle (enfin !) à rester en arrière. Lui-même manque de périr lors du franchissement d’une redoutable cheminée glacée. Et dans les montagnes, accrochée aux rochers, Olga se révèle à elle-même. Aucun vertige, un cran formidable, une compréhension presque intuitive du rocher et de la glace. Le jeune Etienne est épaté: cette femme a du chien !

Enfin, on atteint le monastère, au 1er juin, auprès des ruines de l’antique temple de Nem-Ka. Wilson est formel: il faut se cacher, rassembler les fusils, attaquer ces moines fous, interrompre les danses maudites, donner une chance à la Terre ! Les hommes, virils, préparent leurs plans de guerre. Olga, dormant dans sa tente entre Harding et Sascha, rêve.
Elle rêve d’Ulthar, de la bibliothèque des Anciens, de la Porte Triangulaire. En rêve, accompagnée d’Ogoun, l’homme noir, le fantôme, elle retrouve le livre d’Eibon gravé sur ses plaques d’un métal inconnu, et le bureau et les notes de son père, recouvertes de poussière.
La veille de l’attaque sur le monastère, elle drogue Monroe et l’entraîne à son tour vers Ulthar.
Tout s’éclaire et se débloque alors pour le professeur… Les signes de la langue Aklo, le livre antédiluvien, le sens de ses signes et de ces « danses ». Wilson à tort ! (Je le savais ! Je le savais !) Ils se sont tous trompés ! Les danses ne servent pas à attirer Nemesis mais à maintenir le fragile filet de protection tendu autour de la Terre par Eibon des millénaires plus tôt ! Ainsi nous sommes venus ici pour rien !
A peine éveillé, Monroe retrouve Wilson et l’assomme avant qu’il ait pu faire dégénérer la situation. (Le début scientifique qui s’ensuivra sera passionné, mais influence, côté Wilson, par ce coup sur la tête for peu académique).
Les Tibétains repèrent les visiteurs, les arrêtent et les entraînent au monastère. Des jours d’angoisse s’écoulent comme la comète noire s’approche de la Terre… La rejoint… L’atteint… La dépasse.
Un météore traverse toutefois le ciel. Une graine, un tout petit bout du monstre, qui s’écrase avec une brutalité inouïe en Sibérie. Tenant la main de Harding et regardant vers le Nord, Olga voit le ciel s’illuminer sous le choc de l’explosion de la Tungunska.
C’est la fin de cette aventure.

Olga et Monroe reprennent le lent chemin du retour vers les Etats-Unis.
Au camp au pied du plateau, Monroe enlace son épouse et le petit Abraham Junior, né à 4000m d’altitude. Enfanté auprès du météore, né le jour de l’impact, enfant des étoiles (ce dont son père refusera toujours de tenir compte).
A Istanbul, Olga épouse William Harding, au grand dam de sa mère, et part s’établir aux Etats-Unis, ce qui lui permettra d’entamer une brillante carrière de femme d’affaires et d’alpiniste. Le jeune Etienne entre à son service permanent. 
Monroe et Adèle on un paquet d’autres enfants. Malgré son influence, le nom d’Adèle Monroe n’apparaît sur aucun des travaux signés de son mari. Après quelques années à Providence à diriger le fond Baxter-Passelov, Monroe se voit offrir un poste à Arkham. Il mène une carrière sérieuse de folkloriste et d’anthropologue et publie discrètement une remarquable version traduite et annotée du livre d’Eibon.

Et, dans les cieux, le rejeton imbécile du sultan des démons, continue sa route à travers le système solaire, tandis qu’au centre de l’univers, au son des flûtes impies dansent des forces que nulle âme humaine ne peut comprendre.







25 janvier 2018

Compte-rendu du rejeton d'Azathoth – Partie 4


I have plung’d like a deer thro’ the arches
Of the hoary primoridal grove,
Where the oaks feel the presence that marches
And stalks on where no spirit dares rove;
And I flee from a thing that surrounds me, and leers thro’ dead branches above.
H.P. Lovecraft – Nemesis

Voir les épisodes précédents, marqués sous le libellé Azathoth.

Olga Passelova-Baxter a, en ce mois se septembre 1907, plusieurs certitudes : les travaux de Dmitri sont formels : quelque chose se dirige vers la Terre, une "comète noire", qu’on ne peut voir qu’à l’aide de son télescope du Montana (de ses verres spéciaux… et d’un certain état d’esprit particulier). Baxter et lui ont baptisé l’objet céleste « Nemesis ». Nemesis est accompagnée sur son orbite d’un nuage de météores dont certains peuvent parfois être retrouvés sur Terre: l’un d’eux, disparu, est tombé le 6 juin dernier, le jour même de la mort de Baxter. Un autre est tombé en 1588 et il semblerait que Herrera ait été à sa recherche (voire l’ai trouvé !, se référer à l’épisode précédent).
Autre certitude, un ennemi lutte contre ceux qui veulent savoir. Son père a été assassiné, son frère entraîné dans d’étranges intrigues, des adversaires (bourdonnants) ont tenté de s’emparer des météores… En femme d’action et d’organisation, la comtesse Passelova décide à la fois de soutenir les travaux de ses scientifiques (son oncle Dmitri Passelov, Monroe), de promouvoir la mémoire de son père, et de tenter de dévoiler ses ennemis. 

Faisant d’une pierre plusieurs coups, elle ramène la Palencia à Providence et organise à l’hôtel Narrangasset une exposition des recherches scientifiques entreprises par la fondation Baxter dont le clou n’est autre que le météore, qu’on sortira pour l’occasion de son coffre sécurisé. A la fin de l’exposition, la pierre sera vendue aux enchères.
Le résultat ne se fait pas attendre: un attentat à la bombe dans les salons mêmes de l’hôtel (faisant heureusement peu de victimes), attribué aux anarchistes, une campagne de presse délirante contre Mlle Passelova, présentée comme une folle collectionnant les météores explosifs et, le jour d’une manifestation ouvrière, un flot d’Irlandais pauvres prenant d’assaut la maison de Baxter, fanatisés par les prêches d’un prêtre, le père Fitzpatrick. Olga contre coup pour coup. Emmett Baxter lui organise une campagne de presse favorable et met dans sa poches les intellectuels new yorkais. Le fameux journaliste William H. Harding trace d’elle un portrait élogieux: our Lady of the Stars. L’exposition est un succès, le scandale draine du monde, la vente aux enchères monte à des sommes astronomiques. L’université d’Arkham fait pression sur Monroe pour acquérir la pierre à moindre prix (elle n’est pas si riche), mais cette dernière est acquise par un certain M. Hampstead, riche entrepreneur dans le domaine des mines dans le Vermont (pourquoi s’intéresse-t-il à ce genre de caillou ? Mystère ?)

Autre scène étrange, lors d’une visite privée de l’exposition, portes fermées derrière eux, Monroe (pris d’une étrange intuition/envie) déshabille sa femme (la prend en photo, nue, tenant le météore noire dans ses mains) avant de faire l’amour avec elle juste devant la pierre. Une vision le saisit alors qui le plonge dans l’inconscience au moment de la jouissance. Adèle, horriblement surprise, parvient avec peine à lui faire reprendre conscience avant que les gardiens ne forcent la porte.

Olga Passelova lance John Addams, détective Pinkerton, sur la trace de tous ses agresseurs. Il pointe le rôle très suspect joué par Patterson – le dément en saurait-il plus ? Pourquoi cherche-t-il à manger des cerveaux humains ? – cherche des liens entre Hampstead, Fitzpatrick, l’auteur de l’attentat à la bombe… et arrive à cette angoissante conclusion: tout ceci paraît à la fois coordonné, et sans lien aucun. Sinon des visions, des rêves…
Et la présence récurrente du fantôme d’Ogun (l’Indien mystérieux du Montana… La présence dans la chambre de Monroe et Adèle, la vision dans le jardin) qu’Olga reconnaît comme le serviteur de son « diadia », le professeur Adamsky, cet explorateur russe qui, justement, avait ramené du Tibet la première version du manuscrit du livre d’Eibon !

Quelques semaines plus tard, dans une apparente précipitation, Abraham Monroe épouse Mlle Adèle Grenier, de Neuchâtel. Olga offre les festivités du mariage. Les deux familles sont surprises. Seule Adèle sait, sans savoir, qu’elle est enceinte d’un enfant conçu devant la météorite.

Dernière chose, et non, des moindres : Dmitri Passelov a fini son article, il est prêt à présenter à la communauté astronomique mondiale la terrifiante nouvelle. 1908 pourrait bien être la dernière année de l’humanité ! L’été prochain, la comète croisera de très près la course de la Terre. Dmitri est convaincu qu’elle se dirige droit dessus.
Son oncle n’étant pas pris très au sérieux par les astronomes raisonnables, Olga l’invite au congrès Américain d’Astronomie de Philadelphie d’une manière astucieuse: organisant un concours richement doté demandant à des volontaires de critiquer la publication de son oncle. William Harding, devenu un ami, la soutient dans la promotion de l’évènement. La méthode n’est pas orthodoxe, mais les travaux de Dmitri sont étudiés avec attention. Au final, celui-ci emmène un groupe de sceptiques avec lui dans le Montana, pour leur montrer Nemesis. Mais n’est-il pas déjà trop tard ?

Olga et Monroe ne souffrent pas l’inaction. Baxter étant persuadé que la clé de tout se trouvait dans le livre d’Eibon. Monroe retourne s’installer à Arkham avec sa jeune épouse travailler avec ce vieux fou de Furlong (vieux papiers, insinuations douteuses, délires antédiluviens du vieux, et sexe frénétique sous les poutres sombres de l’appartement loué dans une vieille maison d’Arkham). Adèle se révèle douée pour tracer les étranges hiéroglyphes de l’écriture ‘pré-akkadienne’ utilisée par le Liber Ivonis, Monroe n'aime pas ça. Il empêche la vieille araignée infirme de toucher les mains d'Adèle (mais les travaux avancent !)

Nemesis vient... Si on pouvait la voir avec autant d'évidence !
Pendant ce temps, Olga décide de retourner aux sources. Tout a commencé par des textes anciens ramenés par Adamsky depuis le monastère de Leng, au Tibet. Et s’il fallait retourner là-bas ? Il reste peu de temps, mais cela peut encore être tenté...


09 janvier 2018

Compte-rendu du rejeton d'Azathoth – Partie 3

I had drifted o’er seas without ending,
Under sinister grey-clouded skies
That the many-fork’d lightning is rending,
That resound with hysterical cries;
With the moans of invisible daemons that out of the green waters rise.
Nemesis – H.P. Lovecraft

J’ai pris du retard dans ces comptes-rendus, la vie ayant ses exigences…, mais comme ils sont tout ce qui reste de ces histoires de jeu de rôle, je vais m’efforcer de mener à bout ce projet. 
 
Olga descend à l'hôtel Ponce de Leon. Les princesses russes ne devaient pas y être si fréquentes...

Après des aventures dans le Montana, nos héros se tournent vers la Floride. Avantage de la fortune de Mlle Passalova, tout le monde peut s’installer dans un hôtel de luxe de Saint Augustine, et pendant que Monroe travaille sur les papiers Baxter, Olga s'emploie à faire rechercher son frère par des détectives (hommes et femmes) recrutés par ses soins. Première nouvelle désagréable: apprendre que ce cher Colin est accusé de meurtre et poursuivi par la police !
L’enquête dans la petite ville balnéaire révèle que ni ses anciens marins, ni ses amis ne savent où il se trouve. Et qu’autour de lui courent de terribles rumeurs de profanations de cimetières et vols de cadavres. Ne faisant pas confiance à la police, Olga lâche des hommes de Pinkerton sur l’affaire, qui remontent jusqu’à une mystérieuse ferme où on élève des alligators et où Monroe manquera de se faire tuer. Elle comprendra aussi que, qu’une certaine façon, Colin travaillait pour son père, tentant de retrouver l’épave du Rosario, un navire sur lequel naviguait le jésuite Herrera, astronome un peu hérétique, fasciné par le passage de la « comète noire », la même qui a été repérée par Dmitri Passelov sur les recommandations de Philip Baxter. Ainsi, le professeur de Providence avait plusieurs fers au feu !
Ce séjour est l’occasion aussi pour Monroe de nouer une idylle plus sérieuse avec Adèle. La sensualité de la dame de compagnie anglo-suisse rencontre l’élan fougueux du jeune universitaire américain. Monroe fait sa cour, Adèle se laisse volontiers séduire et se dit que cette affaire pourrait être sérieuse. Quant à Monroe il constate qu’une vie sexuelle épanouie l’aide à avoir l’esprit clair dans ses travaux si compliqués sur les manuscrits de Baxter – mais non, Furlong n’a eu aucune influence sur lui et aucune magie ne se joue là, juste la force du travail, et le mens sana dans le corpore sano, et toutes ces sortes de choses.
On retrouve enfin Colin; avec l’aide d’un avocat et celle de ses relations dans la bonne société, Olga démontre la corruption de la police, le jeune homme est lavé de ses crimes. Des agents de police intègres associés à une armée de Pinkerton traquent les dingues de la ferme aux alligators et leurs complices. Olga décide de faire terminer les travaux de réfection de la Palencia et de confier à son frère et à monsieur Wolffe, son associé le soin de diriger l’expédition. Elle-même se fera un plaisir d’embarquer malgré l’inconfort du cargo.


La Palencia a à peu près cette tête-là, grues en plus.
La lecture du vieux documents et la connaissance de la région par Colin Baxter et son associé aident à ne pas chercher au hasard, mais les recherches sont difficiles. Après plusieurs semaines de croisière, c’est Monroe qui, déduisant des papiers de Baxter certains systèmes de coordonnées liés à l’objet céleste, propose une destination tout à fait originale à la Palencia, quelque part près des Bermudes. Là, plongeant avec Colin, Monroe découvre l’épave du Rosario (on soulignera le courage physique du jeune professeur qui enfile ces terribles tenues de tissu huilé). L’exploration sera très fructueuse, aussi bien d’un point de vue historique qu’astronomique puisqu’on remontera des fonds marins un coffre espagnol contenant un morceau de météorite ! Un élément détaché de la comète noire elle-même durant un de ses derniers passages ! 
(tout ce passage de l'aventure est l'occasion de jouer de purs passages ambiance le Trésor de Rackham le rouge, ce qu'on a rarement l'occasion de faire – une des belles idées de ce scénario)

Le professeur Monroe découvrant le Rosario, au large des Bermudes (dessin de presse belge)
Instruit par le destin des Indiens ayant approché la pierre précédente, nos héros évitent de la toucher et l’enferment dans un coffre. 
Plus troublant encore, le Rosario semble s’être échoué au sommet d’un bloc sous-marin dont les formes pourraient être celles d’un bâtiment.
La fin de saison et les tempêtes équinoxiales approchant forcent à interrompre les descentes et à retourner à terre. En route dans les Bermudes, d’étranges lumières volant en triangle entourent le navire et quelque chose qui bourdonne se pose sur le bateau. Un des passagers est brûlé de la même façon que les bêtes dans le Montana. On se défend à l’aveugle à coup de fusil. On tient les portes, on résiste à l’affolement… et la brume finit par se lever, la Palencia rentre au port.

Voilà Olga en possession d’un étrange météore, persuadée que les intuitions de son père étaient vraies. De son côté, Dmitri met fin à la préparation d’un article scientifique qui va bouleverser l’astronomie (et peut-être le destin de l’humanité…)





01 septembre 2017

Compte-rendu du rejeton d'Azathoth – Partie 2


I have whirl’d with the earth at the dawning,
When the sky was a vaporous flame;
I have seen the dark universe yawning,
Where the black planets roll without aim;
Where they roll in their horror unheeded, without knowledge or lustre or name.
(Nemesis, H.P. Lovecraft)


Ce billet fait suite à la première partie du compte-rendu de cette campagne classique de l’Appel de Cthulhu. S’y reporter pour savoir qui est qui et ce dont on parle. Jeune femme de la noblesse russe en exil, mystérieux corps célestes, mort étrange d’un professeur d’université, le tout dans l’Amérique de 1907…
Attention, si vous avez l’intention de jouer cette campagne, le texte ci-dessous contient nombre de gâcheurs.



Montana
Le vieux train dépose nos héros à Garrison, dans le Montana. Montagnes immenses, forêts profondes, éleveurs taiseux. Nous sommes à l’été 1907, l’arrivée du petit groupe est remarquée : deux dames bien habillées (et encore, elles ne portent que leurs austères « tenues de voyage »), un monsieur bien mis, un serviteur russe avec longue barbe et fusil de chasse. Ceux-là veulent se rendre chez les fous qui ont installé leur observatoire sur la montagne. Très bien ! Un garçon du coin va les accompagner, ainsi que Mr Randall, le Marshall.
A peine s’est on éloigné du fragile îlot de civilisation que les choses deviennent plus difficiles. Orages, bourdonnements mystérieux, chiens tués par de curieuses brûlures. Sylvia Englund accueille sans amabilité la petite expédition dans son ranch, puis se radoucit un peu en découvrant que ce sont des étrangers et non pas les habituels ploucs du coin qui ne supportent pas l’idée d’une femme vivant seule. Au fil de la fréquentation, elle finira même par se lier d’amitié avec Mlle Olga : l’aristocrate russe a du chien et de la sympathie pour les femmes à part, comme Mme Englund.
Puis Mr Randall, parti seul en expédition, disparaît. On retrouvera son corps, dépourvu de tête, au pied d’un arbre, et ce ne sera que le premier drame… Dans la forêt, les brumes rendent fous. Les hommes envoyés à la recherche du glouton (oui, la bestiole) qui a tué Randall (c’est la seule explication possible, non ?) finiront par s’entretuer (pris de boisson ? Ou alors à cause de quelque chose dans la brume ?). L’observatoire est vide, il a été visité par des tueurs de chiens. Et ces bourdonnements, ces bourdonnements incessants… Quelque chose (quelqu’un ?) hante les bois. Volodia dit: « un essaim », Monroe apercevra une sorte d’insecte monstrueux s’en prendre à un des chasseurs. Volodia dit: « il faut tirer au bon moment » et d’un coup de fusil ajusté, Monroe finira par abattre une de ces choses. Mais la photographie du cadavre ne donne rien, on ne voit rien… et le « corps » disparaît, de même que les « objets » que la chose portait avec lui, si incongrus que Monroe refuse de les voir, refuse même d’y penser.   
Olga Passalova fait preuve de cran. Monroe, que sa formation de folkloriste a habitué aux marches à la campagne, se découvre habile au tir au fusil. A force de détermination, ces deux-là parviennent à retrouver le professeur Passelov et son assistant/domestique/(amant ?), Sergueï : l’oncle d’Olga n’était pas mort, mais parti à la recherche de la mystérieuse météorite tombée dans la région le jour même de la mort de Phillip Baxter et introuvable depuis.
Ayant gagné la confiance de Sylvia, Olga fera également la rencontre des Indiens protégés par la Suédoise et découvrira les affreuses brûlures de l’un d’entre eux, qu’elle parviendra à soulager un peu grâce à une cérémonie orthodoxe mâtinée de chamanisme tibétain, issue de sa mémoire et du souvenir de son « diadia » Adamsky.
La région est dangereuse. Quelque chose coupe les têtes. Quelque chose récupère le météore. Des triangles de points lumineux passent dans le ciel. Les habitants sont méfiants, voire hostile envers les étrangers. Olga fait appel à l’agence Pinkerton la plus proche pour qu’elle envoie un homme robuste protéger Sylvia (elle fait bien) et décide de retourner à Providence avec son oncle Dmitri. La prudence l’impose. On n’a pas la météorite ? Tant pis. Tant mieux, peut-être, la chose paraît provoquer d’affreuses brûlures... 
 
 

De Providence à Arkham
Le retour à la civilisation est l’occasion de poser les choses. Dmitri se voit convaincre de tenter une communication scientifique : lui et Sergueï, malgré des méthodes non orthodoxes impliquant des verres spéciaux de la société Welles, on réussi à observer une "comète noire », l’objet deviné par les travaux de Baxter et baptisé « Nemesis » par le groupe du mardi soir. La trajectoire de Nemesis va croiser l’orbite terrestre dans un an environ… De sombres inquiétudes traversent Sergueï : un sentiment apocalyptique bien russe lui fait penser que Nemesis ne va pas faire que passer à proximité de la Terre. Nemesis vient. Mais peut-on en être sûr ?
Olga se lance également à la recherche de Patterson, disparu après l’enterrement de Baxter. On découvre des cadavres de singes au crâne trépané dans la maison qu’il louait à la campagne. On se fait expliquer par sa femme ses étranges variations de comportement. On le retrouve, enfin, quelque part dans les montagnes du Vermont, sain physiquement mais l’esprit ébranlé, bon pour l’asile. Mademoiselle Passalova lui paie des séances avec un psychanalyste jungien réputé, Charles Jenner (on en reparlera plus tard de celui-là).
Monroe entreprend des recherches sur les travaux de Baxter et notamment ce mystérieux livre d’Eibon sur lequel tant de chose semblent basée. Pour cela, pas le choix, il faut retourner à l’université Miskatonic (dont il est issu) et tenter de remonter le fil. La rencontre avec le vieux et détestable professeur Furlong est décisive: il semble bien que Baxter a consulté une source nouvelle du livre d’Eibon, dont jusque maintenant seuls quelques fragments étaient connus, à travers notamment des comptes-rendus d’inquisition du 16ème siècle. Furlong aide Monroe a travailler sur l’écriture Aklo, délire sur Eibon « savant et sorcier de l’antique Lémurie », ne se nourrit que de Coca-Cola et glisse à Monroe des idées (mais sont-ce seulement des idées ?) sur l’accession à la connaissance via l’activité sexuelle. Les vibrations bleues… Les regards en coin de Furlong sur Monroe et sur la servante du vieux savant...
Monroe pense plutôt à Adèle… la charmante dame de compagnie d’Olga, avait laissé comprendre à Monroe qu’elle ne lui était pas indifférente, et l’énergique Américain, plutôt que de faire sa cour à l'européenne, avait saisi quelques occasions durant le voyage vers le Montana. Mais les révélations de Furlong ont glissé un ver dans l’esprit du jeune universitaire. Et si, au milieu de ces délires, le vieux gâteux disait quelque chose de sensé ? (Et si certains signes, tracés sous les yeux même de Monroe durant ses travaux, avaient altéré ses perceptions, sa vision, son travail ?)
La connaissance progresse, Monroe travaille, Olga ne peut pas rester sur place sans rien faire. Justement : n’a-t-elle pas hérité de parts dans l’entreprise Baxter & Wolfe, sauvetage en mer ? Et pourquoi Colin n’a-t-il jamais répondu aux lettres et aux télégrammes ? Et ce navire, la Palencia, qu’on a payé si cher, est-il toujours à Saint Augustine ? Et si on allait passer quelques semaines en Floride ?
(À suivre…)

13 juin 2017

Compte-rendu du "Rejeton d'Azathoth" – Partie 1

Thro’ the ghoul-guarded gateways of slumber, 
Past the wan-moon’d abysses of night,
I have liv’d o’er my lives without number,
I have sounded all things with my sight;
And I struggle and shriek ere the daybreak, being driven to madness with fright.
(Nemesis, H.P. Lovecraft)

Suite à mon billet du mois de mars sur « comment faire jouer le rejeton d'Azathoth », voici un petit compte-rendu de partie. Si les vieilles histoires de rôlistes racontant leurs aventures au coin du feu ne vous intéressent pas, vous pouvez passer ce billet et aller lire une nouvelle fois des articles sur les résultats des législatives. Ah oui, et il y aura des spoilers : si vous avez l’intention de jouer cette campagne, retournez sur lefigaro.fr, vous y serez moins exposés aux radiations.

Il fallait donc lier les personnages au professeur Baxter. Laissez-moi vous présenter mademoiselle Olga Filipovna Passelova Baxter, jeune héritière de moins de vingt-cinq ans, engagée politiquement (sympathisante socialiste), ayant quitté la Sainte Russie pour rejoindre son père car la police tsariste s’intéresse un peu trop à elle et à ses amis. Et, avec elle, Mr Abraham J. Munroe, PhD en archéologie (Arkham University, folklore et géographie), qui se prépare une carrière à la Brown University et qui est parrainé pour cela pour le professeur Baxter, un homme respectable, certes, mais dont les travaux un peu datés attirent les moqueries de certains collègues.
Avec eux, on trouvera aussi mademoiselle Adèle Bergier, dame de compagnie anglo-suisse, originaire du canton de Neuchâtel, et Volodia, serviteur fidèle doté d’une longue barbe, d’une tunique de moujik et d’un fusil.

Avant propos : New York
Le Pr. Baxter aimerait que sa fille juge des qualités du jeune Monroe pour bénéficier d’une bourse du fond Passelov-Baxter. Monroe est donc chargé d’aller accueillir Olga à l’arrivée du paquebot venant de France. Olga pourra ainsi assister à une conférence de Monroe. Une nuit, Olga est réveillée en sursaut par la visite d’un spectre… Son propre père. Un coup de téléphone à Providence depuis le lobby de l’hôtel de luxe où elle est descendue lui apprend que son père (qu’elle n’avait pas encore retrouvé) est décédé.

Providence
La mort d’un professeur d’université est bien sûr une affaire un peu solennelle. Mais enfin, il s’agit simplement d’un accident cardiaque, pas de quoi en faire un plat… Jusqu’à l’arrivée de l’héritière russe, et riche, du défunt. Qui, après avoir sympathisé avec la vieille Angela, décide de donner des funérailles dignes à son père. Le corps est rapatrié depuis l’établissement de pompes funèbres et établi dans une chapelle ardente orthodoxe dans la maison. Une journée de mémoire en l’honneur des travaux du défunt est organisée à l’université, et Monroe se retrouve à devoir babysitter et canaliser l’éruptive héritière. 
A l’époque, personne ne soupçonne rien quant à la cause du décès, le corps n’est pas réellement examiné, il est juste embaumé avec soin et disposé dans une chambre de la maison. L’enterrement a lieu,  en présence unique d’Emmett Baxter dont la femme déteste la Russe folle qui vient tout bouleverser. Monroe et Olga commencent à parcourir le fouillis de papiers du professeur, mais sans guide il est difficile de s’y retrouver… Et où sont Cynthia et Colin ? Et pourquoi Dmitri Passelov ne revient-il pas du Montana ?
Le jour de l’enterrement, Angela ne se réveille pas. Volodia grogne qu’il y a vraiment trop d’araignées dans cette maison… L’enquête menée avec l’aide de spécialistes finit par identifier une morsure d’araignée ! Volodia plâtre les fissures dans les boiseries de la vieille maison et explore et fouille. Un combat épique dans le grenier, et on vient à bout du monstre qui s’y cachait, dont on comprend bien vite qu’il a été envoyé depuis les îles Andaman…La bête ayant été capturée vivante (un spécimen anormal de mygale géante indienne) est envoyée au vivarium de l'université.


Pendant ce temps, Julian Baxter, frère du défunt et clergyman angoissé, finit par avouer avoir depuis des années fourni des narcotiques à son frère.
A la lecture du testament, Olga et Emmett se voient remettre le carnet de rêves de leur père et la carte. Le carnet de rêve fait écho avec un souvenir d’enfance d’Olga où elle se souvient avoir joué avec ses frères et soeurs dans le jardin du sphinx, quelque part en Europe ? Emmett s’en souvient vaguement, mais ça devait être ailleurs, vu qu’il n’a jamais quitté les Etats-Unis…
La journée universitaire en mémoire du professeur Baxter voir l’intervention pondérée de quelques personnalités qui restituent l’homme et son travail, mais aussi une belle intervention de Monroe pondue à la hâte (qui montre à Olga combien l’homme – dont elle persiste à considérer la collaboration comme acquise – est un scientifique sérieux). En conclusion, le professeur Wilson livre une conférence étrange sur un thème liant l’astronomie et l’araignée mythique Atlach-Nata et révélant que les étoiles sont animées d’un esprit… Les beaux esprits sourient devant ce quasi-suicide universitaire en direct. Enfin, peut-être que tout cela sera oublié dans quelques semaines quand l'émotion sera retombée.
Heureusement, Angela reprend conscience, mais un soupçon émerge chez Olga : son père était-il vraiment mort quand le docteur Walters a signifié le permis d’inhumer ?
Peu de temps après, Wilson disparaît en voyage vers la Russie, confiant à Monroe, avec une hésitation, la curation des archives Baxter. Le professeur Brandt, de l’université Brown en profite pour charger Monroe de faire tous les caprices de l’héritière afin d’assurer dans le futur le financement de sa chaire par le fond financier russe…
Olga, qui a justement pu inspecter les comptes du fond Baxter Passelov, dont elle est devenue, par héritage, la responsable, constate que des sommes importantes ont été engagées pour construire un observatoire dans le Montana… Ou pour acheter un bateau en Floride !
Il est temps de clarifier ou de comprendre. Passelov a envoyé un mystérieux télégramme depuis le Montana, parlant d’une "découverte fantastique »… Nos héros s’embarquent donc pour un long voyage au cœur du continent américain.

27 mars 2017

Comment faire jouer le rejeton d'Azathoth ?

Dans la quête sans fin de bons scénarios à faire jouer (en jdr classique, pas en narrativo-vegan, merci), j'ai été orienté par l'excellent Nébal vers le Rejeton d'Azathoth.
Nous voici donc dans une nouvelle réédition Sans Détour d'un "classique" des années 80 de l'aventure lovecraftienne. Le livre est bien fait, bien présenté, les compléments historiques sont bien tournés, les photos plutôt très bien choisies, on se retrouve vite plongé dans l'ambiance des différents lieux de la campagne. Je ne vous résumerai pas le contenu du bouquin, l'ami Nébal le fait déjà d'une manière qui, je l'espère, vous donnera envie de faire jouer cette histoire.

Quelques questions d'ordre éditorial.
Si je suis globalement séduit par les productions de Sans Détour (malgré la terrifiante inflation de leurs prix 1/1D6 points de SAN perdus quand j'ai vu la dernière campagne de foulancement en cours), je reste curieux de savoir s'ils ont réellement fait jouer les campagnes qu'ils publient. Parce ce qu'en ce qui concerne le Rejeton, plusieurs points sautent aux yeux. Si l'esprit de la campagne, ses thématiques, ses décors, ses personnages sont séduisants, la présentation des évènements, des liens entre les morceaux me donnent l'impression de disposer d'un tas de noms, de jolies pièces de puzzle, sans vraiment de liens entre elles. Et si on peut pardonner ce manque de lien à Keith Herber (l'auteur original), je trouve dommage qu'une réédition digne de ce nom ne fasse pas un peu plus d'efforts pour guider les MJs sur comment faire jouer ce vieux machin.
Voici donc quelques éléments que j'aurais aimé trouver dans ce gros bouquin sympathique (je pourrais dire la même chose de presque n'importe quelle campagne publiée par SD.).
- une approche thématique pour donner une ambiance générale à la campagne.
- de multiples suggestions d'accroche des joueurs. Pas le "vous êtes le détective privé employé par le juge Braddock", mais plutôt des suggestions de liens forts entre les PJs et l'académie du mardi soir, par exemple.
- différentes propositions de manière de faire jouer l'histoire. Allez, en vrac : les PJs sont les enfants Baxter. Les PJs sont membres d'une société secrète liée à Eibon. Les PJs sont des agents du GPU. etc, etc. Baxter en chef de culte, Baxter en savant qui a regardé trop loin. Etc. etc.
- un travail sérieux pour lier le scénario de Saint Augustine avec le reste de la campagne.

Les approches de la campagne pourraient s'inspirer par exemple de celle-ci, lue sur Casus NO.

Une proposition pour faire jouer la campagne
Après réflexion, voici la manière dont j'aimerais aborder cette histoire. 
(si vous comptez jouer la campagne, ne lisez pas plus loin ! alerte aux SPOILERS !!)
La thématique de l'histoire est une fin du monde cosmique, avec un mystérieux bolide fonçant vers la Terre, des araignées géantes et des gens qui en deviennent fous. Là couche intéressante là-dessus est celle du rêve. Au fond, cette fin du monde est-elle réelle ? Est-elle le fruit de la folie de Philip Baxter et de ses copains ? Faire des PJs une bandes de tarés luttant contre une fin du monde que personne ne voit venir est une idée assez cool.
Je trouve par ailleurs que la figure de l'araignée comme symbole d'Azathoth, et le lien entre araignée et météore est assez naturel.


Enfin, le tout me semble tourner autour de la personnalité de Philip Baxter, un rêveur tout à fait lovecraftien.
Voici donc ma lecture de l'histoire.
Tout d'abord, je situe le récit en 1907, avec l'idée de faire une scène de fin en 1908 (en espérant surprendre les joueurs. Après tout, historiquement, en 1908 un énorme machin s'écrase au coeur de l'Asie...). Rien dans l'histoire ne la lie très fort aux années 20, on peut donc facilement la glisser 20 ans en arrière.
Philip Baxter n'est pas un archéologue, mais un ethnologue-anthropologiste (on disait comme ça, je crois), un peu voyageur et beaucoup scientifique en chambre. Un lecteur actif et ardent, brasseur d'idées, spécialisé dans les représentations du cosmos chez les peuples primitifs. Vers 1885, il publie Researches into Star Myths, son bouquin le plus connu.
Il a perdu son épouse très tôt et a veillé sur ses enfants, à l'exception du temps d'un long voyage en Russie, à Saint-Petersbourg, chez son correspondant, Dmitri Passelov. Le voyage aurait dû être le séjour d'un été, mais le professeur s'éprend de la volcanique Efraïma Nikolaievna Passelova, sœur du précédent, qu'il finit par épouser selon le rite orthodoxe. Le séjour tout comme le mariage durent trois ans et c'est finalement elle qui demande le divorce, laissant le pauvre Baxter, essoré et épuisé, retourner à Providence et rejoindre sa vie tranquille.
Vers 85, Baxter encore secoué se fait prescrire des narcotiques par son frère et travaille sur ses rêves. Il est dans un drôle d'état et, on ne sait comment, il trouve le chemin d'Ulthar. Là, le sage professeur vit une seconde vie sous les traits d'Exoumenos, le cavalier, toujours en quête d'Eulalia, l'astronome nomade, double onirique d'Efraïma mais aussi figure symbolique de la connaissance qui se dérobe. A Ulthar, dans la bibliothèque aux mille portes, Baxter découvre le livre d'Eibon qu'il étudie durant des années... et ne comprend qu'à moitié.
Du livre, il découvre l'existence de Nemesis, qu'il réinjecte dans ses propres recherches éveillées. Il publie des articles et des textes scientifiques montrant d'une manière totalement foireuses que l'astre tueur est présent dans nombre de visions cosmogoniques à travers le monde. Ses contemporains le critiquent (à raison: les lecteurs rationnels voient bien qu'il est quand même un peu barré), il s'isole un peu et avec un club de copains à lui (Wilson, Patterson et Passelov, venu aux US pour fuir la politique répressive du Tsar) ils discutent de sujets scientifico-esoriques puis fondent un observatoire dans le Montana qu'ils équipent de mystérieux "prismes" issus des travaux oniriques du professeur Baxter.
Pourquoi la graine tombe-t-elle justement par là ? Parce qu'avec leurs fichus travaux, Passelov & co finissent par "voir" Nemesis, et que si vous regardez l'étoile, l'étoile vous regarde. La "graine" est une manifestation de l'attention du monstre envers la Terre.
D'ailleurs, Baxter séjourne en Floride avec Colin vers 1902. Là, il se renseigne sur un astronome expulsé d'Espagne, un moine dévoyé, dom. José Marquez de Granada, qui avait lui aussi laissé des écrits astronomiques mentionnant Nemesis. Marquez, à bord du galion le Rosarion est parti à la recherche d'un météore (qu'il avait repéré... les étoiles vous regardent !) et qui est tombé dans l'océan. A moitié pour son propre intérêt, à moitié pour faire plaisir à son fils, Baxter finance des recherches qui n'aboutiront à rien avant 1907 et la découverte, via le père Jorge, de l'emplacement du Rosario (qui contient donc une autre "graine" - c'est peut-être l'effet des radiations qui a provoqué la perte du navire).
Via les rêves, le sorcier cannibale comprend que Baxter & co, en voulant étudier le phénomène, ne font que l'invoquer (sans doute est-il l'allié du Père Fantôme, un Picte serviteur d'Eibon). Agissant par magie, le sorcier tue Baxter, espérant qu'il n'est pas trop tard... Car Baxter et ses amis, ne comprenant pas le travail d'Eibon pour tenir le monstre à distance, provoquent la catastrophe qu'ils croient prévenir.
Et l'histoire commence.
Je compte bien sûr proposer à un des PJs d'être le fils/la fille russe de Baxter, qui débarque aux Etats-Unis pour rencontrer enfin son père et qui apprend sa mort alors qu'il/elle vient de poser le pied sur le sol américain.