20 septembre 2006

Melanie Fazi - Serpentine

Je viens de finir le recueil Serpentine, de Mélanie Fazi, publié aux éditions de l'Oxymore [1].
Cela faisait longtemps que je n'avais pas lu de recueil de nouvelles fantastiques. J'ai retrouvé le plaisir tout particulier de me plonger dans des textes soignés, qui posent une ambiance, une impression, et la suggestion de quelque chose d'étrange, ou noir, ou effrayant. Des petits dérapages de la réalité...
Ici, nous avons dix textes, tous relativement courts. Voyons ce qu'ils ont de commun, ce qui fait l'unité du recueil.
Tous les textes, déjà, évoquent un fantastique subtil. Pas de gore, pas de mythologies d'être étranges... Le surnarturel est le plus souvent dans les yeux du narrateur ou du personnage principal. Ces tatouages dont on parle sont-ils vraiment "magiques"? Cette mère éplorée ne déraisonne-t-elle pas quand elle dit que l'arbre a avalé ses enfants?


Les personnages de Mélanie Fazi rêvent beaucoup et se racontent des histoires, entre eux ou à eux-mêmes. Ils vivent dans notre monde contemporain, ils sont tatoueur, fan de rock gothique, peintre mal en mal d'inspiration, adolescente en fugue, tenancière de restaurant grec. Vous pourriez les croiser, et c'est ce qui fait leur charme. L'écriture est charnelle, toute en sensations, douleurs, blessures, parfums d'herbes et de vin, écorce, caresse...
Un point intéressant est que quasiment aucun de ces textes ne comporte vraiment "d'action". Il s'agit plutôt de petits tableaux, très fins, très délicats, qui dépeignent les étranges situations dans lesquels sont plongés les personnages [2]. Les texte les plus réussis de Mélanie Fazi sont des portes ouvertes; ils m'ont fait l'effet de la musique, des paroles des chansons que vous aimez. L'auteur vous emmène avec talent dans un autre monde, une autre vie, et offre un support à votre imagination. A vous de voir comme l'affaire se termine... Et c'est tant mieux. Rien de clos, rien de fermé.
L'imagination s'envole à chaque fois, sur rêves du cendre (délire pyromane, je repense à la chanson de Noir Désir), sur nous reprendre à la route, sur le passeur ou sur Matilda (très touchante évocation d'un concert de rock).
Cette capacité d'évocation est la plus grande force de ce recueil.
Les nouvelles de Mélanie Fazi m'ont donné envie de relire les textes de Serena Gentilhomme et croyez-moi, ce n'est pas un mince hommage.

[1] les éditions de l'Oxymore ayant malheureusement mis la clef sous la porte, le livre est désormais épuisé. Je crois savoir toutefois qu'on peut encore le trouver à la librairie Scylla, et que l'auteure disposerait de quelques exemplaires chez elle (http://www.melaniefazi.net).

[2] Les quelques textes comprenant une "histoire" sont d'ailleurs pour moi les moins convainquants (Mémoire des herbes aromatiques, Ghost Town Blues)

2 commentaires:

  1. Le livre à été réédité chez Bragelonne, je ne sais pas s'il y a eu ou non modifications par rapport à l'article.

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  2. le recueil est disponible chez folio SF en poche.

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