29 septembre 2025

Il était une fois dans l'Ouest - Sergio Leone






Oui, bien sûr, je l'avais déjà vu, il y a longtemps, mais c'est une douceur particulière que de dire à Marguerite : "tu avais aimé le bon, la brute et le truand, non  ? Assez de temps a passé, ce soir on va regarder un autre film du même type."

Et après les dix-quinze minutes de la scène d'ouverture, le type avec la goutte qui s'écrase sur son chapeau, la mouche sur la face du truand, le grincement de l'éolienne, le cliquètement du télégraphe et le grondement grondement grondement du train avant que l'homme tenant un sac de voyage apparaisse sur le quai et joue de l'harmonica, elle m'a dit "toutes les scènes seront aussi lentes que celle-là". J'ai dit "ben non", et en fait, si.

En vérité, on a aimé, elle et moi. Les longs caches poussières qui claquent dans le vent. La musique qui traine ses ritournelles. Les grands yeux de Claudia Cardinale. Le visages burinés en très très gros plan. Les personnages brutaux et mélancoliques.

Quelques remarques qui nous sont venues en en parlant :

- la dynamique des personnages est assez similaire à celle du "bon...". Il y un gentil pas très gentil (Bronson = Clint), un méchant très méchant (Henry Fonda = Lee Van Cleef) et un type douteux finalement assez sympathique (Cheyenne = Eli Wallach)


- la première moitié du film, quand on ne connaît pas les tenants et les aboutissants de l'histoire, est très flippante. Notamment le moment de l'harmonica dans la nuit devant la maison des McBain.

- Jill est un beau personnage, c'est très chouette de découvrir le récit et la situation à travers son point de vue et sa position, très instable, très fragile. Quel dommage qu'elle ait si peu d'agentivité... Je n'ai pas beaucoup de sympathie pour Leone et Bertolucci là-dessus.

- Les visages d'hommes apparaissent souvent en très gros plan, on en voit toutes les imperfections. Le visage de Claudia Cardinale est toujours impeccablement maquillé et jamais vu de trop près.

- Morton est aussi un bon personnage. Quelle incroyable idée, le type qui se suspend par les mains dans son train !

- Au cinéma, un tiroir ouvert contient toujours un revolver. Ou, au moins, une arme.

- L'homme à l'harmonica est quand même un gros connard alors qu'il pourrait l'être un peu moins. Pourquoi essaie-t-il de violer Jill ? Quel est le sens de cette scène ?

- j'aime le fait que le duel final se passe dans une arrière-cour. Qu'en fait, plus personne n'en a rien à foutre, de l'harmonica, de Frank, de ce qu'ils font. Tout ça passe.

- Mais le pendu... La cloche... Ca donne des frissons.

Bref, super film anyhow.









23 septembre 2025

Le passager du Polarlys - Georges Simenon

Ce Simenon là n'est pas un Maigret, mais c'est un must pour amateurs de l'AdC. Un cargo qui part de Hambourg vers la Norvège. Des passagers mystérieux, dont un qu'on ne voit jamais. Un meutre. Un capitaine qui a du boulot mais qui doit aussi s'occuper de ce bazar. Une ambiance incroyable (alcool, glace, vieux moteurs, mouvements dans les ombres). C'est très très effiface et super bien.

D'autres Maigret - George Simenon

Dans ce petit post de blog, j'essaie de lister les Maigret que j'ai lus, afin d'éviter d'acheter plusieurs fois les mêmes.

Piotr le Letton : celui-là c'est le Maigret originel. Histoire de bandits internationaux et de grands hôtels dans les années 20/30. Je l'ai adapté sans souci en scénario "roman noir" pour notre PJ détectrive à New York. L'intrigue repose sur un truc officiellement interdit aux auteurs de roman policier, mais qui marche vraiment bien ici. Je l'ai beaucoup aimé !

Maigret et l'homme du banc : un petit employé dans la cinquantaine est retrouvé assassiné dans une ruelle, portant des chaussures jaunes qu'il n'uarait jamais mises... Je suis arrivé à la moitié de ce lui-ci avant de me rendre compte que je l'avais déjà lu. Mais en fait, il est bien, en portait déprimé d'un milieu de petite classe moyenne. Les femmes de ce récit sont toutes horribles. (Ce n'est pas toujours le cas chez Jojo Simenon)

Maigret et monsieur Charles : celui-ci est le tout dernier, écrit dans la maison forteresse suisse de Jojo. Portait psychologique d'un mariage bourgeois qui part en sucette. Je me rappelle qu'il m'a plu.

Maigret et les braves gens : je ne m'en rappelle plus trop, mais je l'avais bien aimé. Encore une histoire de bourgeois.

Maigret et le coroner : Maigret assiste à une enquête aux USA. Le roman est assez bancal, loin de la brasserie Dauphine et des demis posés sur la table en attendant le suspect, mais je me rappelle d'une histoire maligne, avec un assassinat le long d'une voie de chemin de fer.

Le chien jaune : un roman des années 30, thriller des brumes à Concarneau. Vraiment cool.

La nuit du carrefour : lu, mais oublié. M'a laissé une impression très moyenne. (années 30)

La guinguette à deux sous : celui-ci se passe en bord de scènes. J'avais trouvé les ambiances vraiment super (années 30)

Maigret et le ministre : une affaire de magouilles policières et de rapport volé. Je l'avais trouvé bien.

Maigret et le corps sans tête : des bistrots, le canal saint martin et un corps sans tête. Je me rappelle l'avoir beaucoup aimé.

Maigret se trompe - Georges Simenon

Dans ce Maigret, une ex-fille des rues est retrouvée assassinée dans l'appartement très bourgeois qu'elle occupait avenue Carnot. On sait qu'elle voyait souvent Pierrot, son ancien bon ami. Mais alors pourquoi la concierge est-elle incapable de dire à quoi ressemblait l'homme qui payait le loyer de ce logtement luxueux ?

Celui-ci est un bon Maigret. L'intrigue est bien arrangée et elle met en scène un intéressant personnage de chirurgien célèbre et ayant du mal à se retenir avec les femmes (=violeur en série) qui sonne assez juste quand on voit certains professionnels de santé qui terminent dans la chronique judiciaire. Bien sûr, là, on est dans les années 50, tout le monde trouve ça très bien. Sauf Maigret, peut-être...

Spoilers: je me demande combien Simenon parle de lui à travers ce chirurgien. 

Spoilers 2: pourquoi est-ce que Maigret "se trompe" ? Peut-être parce qu'en vérité il ne parvient pas à amener au procès le principal gros gros connard qui manipule tout le monde avec son air de ne pas y toucher.

16 septembre 2025

Dans la maison de la liberté - David Grossman


J'ai trouvé très éclairant et très intéressant ce recueil de conférences et d'interviews de l'écrivain israëlien David Grossman. Il y aborde de nombreux sujets. La mémoire de la Shoah, la cohabitation et la guerre entre Israël et la Palestine, la vie en temps de guerre, le travail de l'écrivain et la liberté qu'il offre dans un monde oppressant. Le relation à l'espoir et au désespoir (écologique dans mon cas) me parle bien.

Même si la plupart des entretiens datent d'il y a dix ou vingt ans, son discours et sa compréhension des manipulations des affects israeliens par l'affreux Netanyahou me semble toujours valable.

Ca m'a donné envie de lire ses livres.

Quelques citations (je pourrais en sortir plein)

Sur l'espoir.

En d'autres termes : l'espoir est le fruit d'un acte volontaire de l'imagination et, dans une certaine mesure, il est possible de le considérer comme un acte de création : il peint pour l'homme asservi, pour la société opprimée tout entière, le tableau d'une existence riche et dynamique, différant fondamentalement du « tableau » dans lequel l'homme et la société se sont momentanément emprisonnés.
Et il est aussi possible d'affirmer que l'espoir est une sorte d'ancre jetée du plus profond d'une existence asservie et désespérée dans une réalité qui n'existe pas encore sinon dans les souhaits de l'homme. Mais le fait même de « jeter » une ancre dans le futur, la faculté même de le faire, crée déjà un espace de liberté dans le cœur de l'homme qui ose encore espérer.
Voilà donc une démarche intéressante : des individus - ou une société tout entière - projettent au loin, au cœur de l'avenir, une vision ou un rêve et, dès lors, la vision et le rêve commencent à agir sur ceux qui les ont créés et les attirent tel un puissant aimant.

Sur "les partis du désespoir" (et la droite israelienne)

Quand les accords d'Oslo ont échoué, nous avons été sévèrement punis pour cette trahison par des années de violences et des centaines de victimes.
Mais cette erreur ne sera plus réitérée - promettent les partis du désespoir en Israël -, dorénavant nul ne nous surprendra plus à croire que les relations avec nos voisins et la paix sont possibles. Dorénavant, nous ne croyons plus en aucune promesse, nous ne croyons en aucune chance de réussite.
En l'occurrence, la droite a triomphé en Israël. La droite a réussi à inoculer à la majorité des citoyens sa vision du monde qu'elle propageait ces dernières décennies.
En un certain sens, si la droite a vaincu la gauche, elle a aussi vaincu Israël. Non seulement parce que cette vision du monde pessimiste accule Israël à la stagnation à un point critique de son existence, là où il lui faut tout faire pour obtenir la paix avec ses ennemis, là où sont exigées audace, souplesse et créativité. Mais encore la droite a vaincu Israël en portant un coup fatal à ce que, jadis, on appelait l'« esprit israélien »: cette étincelle, cette capacité à renaître, à se réinventer, cet esprit du « malgré tout », et le courage, l'initiative, l'espérance.

Sur la création de personnages

Je ne peux pas décrire un personnage qui n'est pas moi, et qui ne deviendra pas moi.
D'habitude, le plus grand nombre d'entre nous préfère penser qu'il est soit un homme soit une femme, soit un enfant soit un adulte, soit normal soit fou, soit israélien soit palestinien. Quand vous êtes écrivain, vous êtes à même de vous mouvoir de façon très libre sur cette ligne et vous discernez que tant d'options nous constituent. Oui, Je peux donc aussi être une femme, l'enfant que j'ai été et ensuite la personne très âgée que j'espère devenir dans vingt-cinq ans. Je peux être normal et fou, je peux aussi être palestinien et israélien, je peux être colon et gauchiste. Et même, je voudrais être tout ça. C'est une façon d'être dans la réalité. Je ne veux rien dénier totalement, je ne veux pas tourner le dos à quoi que ce soit. J'atteins mes limites quand il s'agit de quelque chose comme Daech.
Ses adeptes me sont hermétiques. Je suis sûr qu'ils ont leur logique et leurs croyances, mais comme ils n'amènent que la mort, c'est un lieu qui ne m'intéresse pas. Les puissances qui génèrent la mort ne m'intéressent pas. Mais toutes les autres options humaines, immenses et riches, je ne veux pas les proscrire de mon être. Dans la courte durée de notre vie, pourquoi devrions-nous nous restreindre à telle ou telle chose ?


14 septembre 2025

Babel - R.F. Kuang


Babel
est une fantasy XIXᵉ où la révolution industrielle est propulsée par une forme de magie originale : des barres d’argent enchantées, gravées de paires de mots (match pairs, j’ai lu en VO) désignant le même objet dans des langues différentes. L’effet magique naît du sens qui se perd dans la traduction. C’est de la magie étymologique : vraiment malin, et les effets proposés sont accompagnés de considérations savantes sur le sens des mots et sur les aspects sociaux et locaux des significations.

L’histoire se déroule dans les années 1830 et suit Robin Swift, un jeune Chinois arraché à la ville de Canton par le professeur Lovell, afin d’être envoyé étudier la traduction à Oxford et d’entrer à Babel, comme on appelle l’Institut royal de traduction. Là, il pourra mettre à profit ses excellentes connaissances en anglais et en mandarin au service de la fabrication de superbes nouvelles match pairs.

(à partir de maintenant, je spoile un peu : fermez les yeux si vous ne voulez rien savoir - les spoilers s'arrêtent dans une dizaine de lignes)

Le jeune homme découvre les merveilles de l’Angleterre, les beautés d’Oxford, les joies de la connaissance, ainsi que de sympathiques camarades dans la même situation que lui : Ramy, un séduisant Indien musulman ; Letitia, une jeune femme de la bonne société anglaise (ooooh, une femme !) ; et Victoire, une jeune personne d’origine haïtienne (ooooh, une femme, et noire en plus !). Bien sûr, Babel est l’institut le plus prestigieux, mais ce n’est pas marrant d’être noir, femme ou « jaune » à Oxford à cette époque. D’autant que Robin reçoit en parallèle une éducation politique un peu brutale et découvre les joies et les bénéfices du colonialisme (pour l’Empire britannique), notamment autour du déclenchement de la première guerre de l’opium — une des petites horreurs coloniales européennes dont on ne parle pas trop parce que bon, c'est vraiment dégueu. Plus intéressant encore : le roman montre combien la recherche universitaire, même sur des sujets apparemment « nobles », peut devenir un instrument de domination.

(fin des spoilers — et début du moment où l’auteur de ces lignes donne son avis)

La partie initiatique du roman et la découverte du monde universitaire sont très réussies. Le livre est un cri d’amour (très critique) envers Oxford, city of dreaming spires. Les ambivalences de Robin, la manière dont il se ment à lui-même, sa relation avec Lovell : tout cela est très fin et vraiment intéressant.

Après que le personnage a traversé le voile, le roman aborde un à un un paquet de thèmes progressistes : décolonialisme, racisme, sexisme. Tous sont soigneusement traités, mais sans subtilité. Je pense que les horreurs coloniales méritent tout à fait d’être dénoncées et expliquées, mais ici le roman y va un peu à la truelle, ce qui a réduit mon intérêt pour le récit. (Chronique écrite par un vieux mec blanc — à percevoir selon votre point de vue personnel.)

Enfin, la structure imaginaire de l’histoire (la magie étymologique remplaçant la machine à vapeur) ne fonctionne pas totalement pour moi. Je n’arrive pas à dire pourquoi, mais ce monde ne me semble pas tenir debout de bout en bout.

Babel reste malgré tout une lecture très intéressante, ne serait-ce que pour sa manière de jouer avec les mots et pour la description sensible de son protagoniste et de sa relation avec son tuteur. Cette dark academia fantasy mérite tout à fait d’être lue.

(merci à Camille pour le cadeau !)

09 août 2025

Les jours, les mois, les années - YAN Lianke

Je ne connaissais rien de cet auteur. Le livre m'a été recommandé par une aimable libraire de la librairie Ouvrir l'oeil, à Lyon.

Un village, dans un coin qu'on imagine dans les montagnes proches du désert de Gobi. Sécheresse terrible, plus rien pousse, les habitants fuient la chaleur et la mort, ne restent plus qu'un vieux (l'aïeul) et son chien aveugle (l'aveugle). Un seul épis de maïs pousse encore, il va crever si personne ne s'en occupe. Lui, il reste.

Ce court roman raconte la lutte misérable du vieux et du chien pour que pousse la plante. Il n'y a plus personne dans la région, plus personne d'humain s'entend... Après chaque jour, chaque souffrance, un nouveau jour, une nouvelle souffrance, et la vie s'accroche et lutte et c'est là toute la beauté et la force de ce court roman. La vie y paraît, au-delà de nous, de nos pauvres efforts.



08 août 2025

Don Juan - Monbijou-Theater

En vacances dans la grande ville de Berlin, l'auteur de ses lignes, accompagné de Rosa et Marguerite, a pris au sérieux la suggestion de ces dernières : si on allait à ce joli théâtre, voir jouer Molière, en allemand ? Après tout, on connaît l'histoire (ou bien on va la relire vite fait) et on a appris la langue de Goethe à l'école, autant pratiquer un peu.

Le théâtre Monbijou est un théâtre semi circulaire, en plein air, à deux pas de la célèbre Île des musées de Berlin. Bar à l'extérieur, petite restauration, lampions, c'est joli et gentiment punk. La musique va être assurée par JennyRebecca au chant, guitare électrique et looper, perchée avec son haut de forme sur le côté de la scène.


Dom Juan est une super pièce de JBP, mettant en scène ce personnage détestable et magnifique qui ne respecte rien. Ni le mariage, ni ses dettes, ni l'honneur (quoi que), ni surtout pas, Dieu.

La mise en scène du Monbijou est "d'après Molière", ça veut dire qu'ils ont modernisé et destructuré la pièce. L'essentiel y est, les meilleures scènes, mais avec deux actrices et un seul acteur sur scène il a fallu adapter un peu. Beaucoup. En fait, c'était génial. Sagnarelle fume une clope en bordure de scène en balançant des vannes, Dona Elivre apparaît au sommet du grand escalier vêtue d'une robe rouge super classe (et elle éclate la gueule de Don Juan à coups d'arts martiaux - tant pis pour lui) et Don Juan... il est maquillé, queer, ongles bleus, chaussures compensées, l'esprit au scalpel, souple, énergique, il jette des fleurs à tous les membres du public (hommes ET femmes), s'assied à côté de Charlotte là-haut dans la scène et il ne s'arrête jamais, jamais de faire ce qu'il  veut, d'aimer qui il veut, de conquérir les coeurs comme Alexandre conquiert les mondes.

Dona (rote) Elivre


Tiens toi droit !


C'est un spectacle hyper physique, du théâtre comme j'adore, avec des cris, de la sueur, des acrobaties, des chansons et des images qu'on voudrait garder toujours. (alors oui, c'était en allemand, on n'a pas tout compris et manqué 50% des blagues, mais 1) on connaissait le texte français qu'on a retrouvé ici et là, et 2) un jeu si physique et si visuel te donne toujours le contexte). Et Dom Juan est à la fois affreux et sympathique, se jettant avec orgueuil et obstination et joie vers le gouffre. 

Dans la scène finale, Don Louis est remplacé par sa maman, car de nos jours rejeter le père n'est plus une provocation. "Sitz gerade ! Ja, ja, mama", tandis que crier et appeler à la mort de la mère... Et à la fin, Don Juan arrache la nourriture de la bouche de Sganarelle pour son terrible Abendessen où le commandeur va finir par se pointer, et les acteurs font un truc affreux et drôle avec une pastèque, tout ça dans le soir de Berlin, avec la musique des bars autour et les grondements du métro aérien.

Pauvre pastèque

C'était génial. Voir Molière ainsi repris, travesti, rendu vivant. Voir, sentir, Don Juan se débattre pour nous, vivre tout ce que nous sommes, ainsi, sur scène, dans un moment de grâce.

Il faut bien danser face à la mort, portant déjà le linceul

 

05 août 2025

Au bal des absents - Catherine Dufour


Claude est une chômeuse en fin de droits qui n'a pas grand-chose pour elle, excepté son petit studio. Qu'elle perd bicose, we said, "fin de droits", you know ? (c'est un peu comme le début de Vernon Subutex).
Alors quand elle reçoit une offre d'emploi chelou via LinkedIn qui l'invite à séjourner dans une improbable location AirBnB pendant quelques semaines contre rétribution, elle ne fait pas la difficile et voilà go, elle est partie dans un coin perdu de France, et la location est une grande maison vraiment confite dans le passé et bien... elle est hantée. Et même carrément TRES hantée.

Dans ce petit roman (sa densité et sa brièveté sont une de ses nombreuses qualité), Catherine Dufour explore le genre du "roman de maison hantée" dans la France des années 2020, avec réseaux sociaux, minimas sociaux et workings poors qui dorment dans leur voiture. Et c'est vraiment très bien. Il y a des idées tout le temps, du suspense, des retournements de situations, des personnages secondaires douteux et moins douteux, une héroïne tétue (qualité de pauvre) et ni très jolie ni très sympathique, à la destinée de laquelle on s'attache. On comtpe les euros, on vide le bénitier de l'église d'Iliouville, on observe le prix des vieux meubles et des petits objets sur e-bay... Le passé suinte, et colle, et mord, glacial. On se demande ce que sont devenus les domestiques et qui peut bien faire le ménage dans la maison aux fantômes. Bref, c'est rigolo, pertinent et malin. L'autrice se permet même de nous livrer, quelques trucs sur sa méthode de travail. Et tout ça ne serait rien sans le style à la fois tendre et caustique de Catherine (oui, disclaimer, je la connais et je l'aime bien - mais cette chronique est garantie sans copinage). 
D'une curieuse façon, ce livre court est un cousin de la trilogie-des-genres de Léo Henry (Le casse du continuum, la panse, Thécel). Ce n'est pas un "grand roman", ça ne veut pas l'être, c'est juste distrayant, intelligent et très bien écrit. Et assez souvent, ça fait peur.


24 juillet 2025

Kingdom of Heaven - Ridley Scott

Hier soir, avec Cecci et Marguerite, nous avons regardé Kingdom of Heaven, de Ridley Scott, qui m'avait laissé une impression mitigée à sa sortie. Alors, oui, Orlando Bloom a une seule expression durant tout le film, et il y un seul perso féminin (enfin, deux, mais le premier est mort avant le début du film), donc ça va être hard de passer le test de Bechdel. Et le héros est trop fort, il sait tout faire, apprendre à se battre en cinq minutes, fabriquer des machines de siège et monter un système d'irrigation dans un pays qu'il vient de découvrir parce que les gens qui habitent là, bêtes, n'en ont jamais eu l'idée.


"Go, and tell Saladin that Jerusalem is coming"





Mais à part ça, on a aussi des costumes superbes, des décors qui ressemblent à des tableaux, des trucs qui flottent dans l'air (cendres, pétales, papiers - Ridley Scott signature), des drapeaux, encore des drapeaux, des armées immenses, des personnages musulmans très beaux, des templiers, et quelques images vraiment puissantes. Avec des drapeaux.
Je me suis laissé prendre dans cette quête mystique pas très causante, avec une musique ample et le passage de l'ombre à la lumière, la découverte du monde par ce jeune homme en quête d'un dieu et d'un sens.
Marguerite dit que ce film a des points communs avec le treizième guerrier : un personnage qui passe d'un monde à l'autre, la rencontre des cultures et un siège désespéré. Et, fun fact, une citation musicale durant la scène de l'adoubement collectif !
Nous avons regardé la director's cut, conseillée par Sabrina K*, et d'après les revues en ligne elle est bien mieux (réellement) que la version cinéma. Le film m'a paru en tous cas avoir une belle cohérence de rythme et de dramaturgie, qui m'a emporté. Narrativement, j'aime l'idée d'un combat final dans lequel on ne souhaite la victoire d'aucun côté. Et sortir en 2005, en pleine war on terror, un film prônant une vie paisible entre chrétiens et musulmans et montrant de manière positive un chef musulmans portant la barbe, c'était quand même pas mal. 
Et le personnage du roi lépreux... J'aime déjà le film juste à cause de lui.





18 juillet 2025

Akira - Otomo

Hier soir, on a regardé Akira avec Marguerite. Je n'avais pas revu ce film depuis environ mille ans. C'était super beau. L'histoire est à peu près sous contrôle pendant 90 minutes, la fin est un grand trip apocalyptique plein d'images superbes mais qui part en complète sucette. 

Restent l'animation, de toute beauté. La scène de poursuite en moto du début, immense moment.







Quelques réflexions de visionnage 2025 :

J'avais oublié que le film était aussi violent !

La scène du gars qui emmène l'enfant et se fait prendre dans les projecteurs de la police anti-émeutes... Graphiquement, c'est incroyable.

Une grande ville brutale de 2019 aux institutions éducatives déglinguées, aux flics violents, aux troupes anti-manifestation armées de flashball et de lacrymos en immenses quantité, ça me rappelle quelque chose. Les manifs contre la réforme des retraites ?

Je ne m'étais pas rendu compte de combien le style graphique d'Otomo avait d'échos avec celui de Moebius, notamment dans le design des personnages et de leurs fringues.

L'histoire n'est pas très sympa pour ses rares persos féminins. Kaori, victime d'une tentative de viol ? Les motards s'intéressent plutôt, d'abord, à la moto, puis à Tetsuo. De toute façon elle meurt à la fin, absorbée dans Tetsuo, alors qu'elle tente des trucs... Kei est un peu plus favorisée, elle a un look cool, mais elle devient rapidement un véhicule pour Lady Kiyoko, autant pour son agentivité. (et sinon, elle passe son temps à appeler Ryu)

Bizarre que le Colonel (techniquement, un dictateur militaire) soit présenté comme un personnage aussi sympathique.



17 juillet 2025

Manhattan beach - Jennifer Egan

C'est l'été, je lis des trucs sur la plage, sortis d'une boîte à livre.

New York, 1942. Anna Kerrigan travaille au chantier naval où on fabrique de gros bateaux de guerre. Son papa  Eddie, un type cool, a disparu quelques années avant, elle vit seule avec sa mère et sa soeur handicapée... et elle va se retrouver en contact avec Dexter Styles, un homme au croisement entre le milieu des trafiquants et les grandes familles, qui pourrait être en rapport avec la disparition de son père.

Le premier truc qui me vient à l'esprit en parlant de ce roman est "c'est bien fait".

Le récit est rythmé, intéressant. Parle de l'émancipation des femmes : depuis Agnès, la mère d'Anna, ancienne "girl" de cabaret, Anna qui devient indépendante et ouvrière et qui se lance dans des trucs réservés aux hommes grâce à la guerre, en passant par les personnages qui l'entourent, Nell, Rose, les "mariées"... 

Les décors sont intéressants : les demi bas-fonds de NYC (j'ai pris ce roman en me demandant si j'y trouverais matière pour un scénario Cthulhu Confidential - non), cabarets, bars de front de mer, chantier naval, marine marchande... L'autrice s'est top top documentée, tout paraît solide, réaliste (et ça se voit). L'histoire est bien menée, c'est une sorte de fausse romance. La narration tisse plusieurs époques et plusieurs fils, bien arrangés, "by the book". Ajoutez la touche féministe, bien vue, et même un traitement sensible du handicap. Bref, rien à reprocher, une lecture de distraction, intelligente, juste super fabriquée. Ca ferait un bon film ou une bonne série TV.
 

PS: Hey, monsieur 10-18 !!!! La couv dans sa partie basse (mal découpée de la partie haute) représente un "pier", classique aménagement de bord de mer du monde anglo-saxon. L'image de ce pier vient de la première photo qui sort du googling "manhattan beach". Ce pier existe donc vraiment (pas un pb), mais dans la ville de Manhattan Beach, en Californie. C'est à dire pas du tout l'endroit où se passe l'histoire. Couv IA ou illustrateur paresseux ? Nul, en tous cas.

16 juillet 2025

Mon vrai nom est Elisabeth - Adèle Yon

 

Une peur court dans la famille de la narratrice. Les femmes, vers l'âge de 20-25 ans, deviennent folles. A partir de ce point et d'une angoisse personnelle, elle se lance dans une enquête qui l'amène rapidement jusqu'à son arrière grand-mère, Betsy... La folle, justement.

Ce livre est très intéressant car il développe deux axes : le premier, l'histoire traumatique et d'une femme des années 40 dans une famille de la bourgeoisie catho. Le second est la manière dont la narratrice raconte son enquête, ses découvertes progressives, à travers des discussions familiales et des accès aux archives, directes ou indirectes. Il y a un côté presque thriller dans cette échelle de découvertes. 

On reste dans la littérature "moi-je" (que je n'ai jamais aimée - et c'est le principal point agaçant du livre), avec ce twist d'être une tentative de prendre la parole pour ces femmes du passé à la mentalité un peu forte et à qui on l'a fait payer cher.

Je ne spoile pas le contenu de ses découvertes, même si les journaux l'ont pas mal fait ;  ça a été un des effets très forts du "roman" sur moi de découvrir les couches de la vérité en même temps que la narratrice, mais vous pouvez égrenner les TW, parce que ça fait mal. A titre perso, je considère les lettres d'amour d'André comme de beaux extraits d'histoires d'horreur familiale. 


15 juillet 2025

Exposition Soulages -- au musée Fabre

L'exposition Soulages (nommée la rencontre) au musée Fabre de Montpellier est très bien. Elle a été mon premier contact avec l'oeuvre de ce peintre. J'ai mis des repros ci-dessous, pour mémoire, mais des tas de pixels pour représenter ces peintures, celles-ci en particulier, ça ne rend rien du tout. C'est d'ailleurs peut-être la première révélation de cette visite (évidente pour moi) : ces peintures ne peuvent se comprendre que lors d'une rencontre en présence, physique, avec les objets. Cadres, aplats de noir, coups de pinceaux, reflets du lumière sur la matière... 

Soulages a expérimenté toute sa vie avec la lumière, celle qui jaillit du blanc de la toile, celle des transparences à travers le broux de noix, celle entre les grilles de ces calligraphies de lettres qui n'existent pas. Pouvoir parcourir ce travail, ces recherches, est passionnant. Juqu'à cette découverte de la "la lumière secrète du noir", encore une très belle idée, très vraie.

J'ai été enfin touché par la découverte de la relation entre l'oeuvre et l'espace (les toiles suspendues, disposées dans des espaces plus grand), qui rejoignent ce que j'ai compris de l'oeuvre de Richard Serra à travers le chef d'oeuvre de Juan Tallon. (super bouquin que je n'ai pas chroniqué ici, tiens, dommage). Les oeuvres ne sont pas seulement des objets, mais des objets qui s'inscrivent dans un espace où entrent le regard et le corps du visiteur, de la visiteuse. Cette relation du corps à l'oeuvre me parle beaucoup.

Je l'ai découverte il y a des années avec le plaisir de rendre visite à certains de mes tableaux favoris (le concert champêtre, au Louvre, les pélerins d'Emmaus de Rembrandt... et plein d'autres). Quelque chose se passe, une émotion particulière, une joie, quand on entre en présence de ces oeuvres avec lesquelles notre coeur s'accorde.

L'exposition du musée Fabre (dont je livre donc quelques images ci-dessous) est très intelligente et très bien, rassemblant aussi bien un parcours thématique de l'oeuvre que d'autres oeuvres avec lesquelles PS est en dialogue (dont quelques oeuvres de femmes, oooh), et parmi ces quelques oeuvres, tiens tiens, les mêmes pélerins dont j'ai parlé plus haut, je vous le mets tout en bas.

Calligraphies zarbi - ça a fait écho pour moi avec les recherches d'Aberlour pour la bombe iconique


PS a été inspiré par l'art pariétal et les oeuvres préhistoriques en général, comme cette pierre gravée. Est-ce que ce lien entre préhistoires et art aux limites de la perception me fait kiffer et se relie pour moi aux délires lovecraftiens ? Je ne sais pas si je vous permet de le dire.

Un outrenoir avec des slashs de blanc et un de mes préférés.

L'exemple typique du tableau fait d'acrylique brillant qui ne rend, mais alors, pas du tout en repro, alors qu'il est trop bien en vrai.

Un Mondrian qui j'aime vraiment bien. Arbre vitrail de brume.

Des lumières bizarres passant à travers des colonnes noires. 

Un des tableaux de mon best of perso de le monde. Tout le doute et l'espérance et le secret et la lumière et l'évidence dans une seule image


14 juillet 2025

NOUT - luvan

NOUT s'écrit en majuscules (en tous cas, j'ai envie de l'écrire telle). luvan s'écrit en minuscules.


Ainsi, dans les milliers/millions d'années à venir, la Terre prendra des chemins étranges. Et la vie deviendra différente. Et la conscience, différente. La vie deviendra. Qui pourrait embrasser ce vertige, de la vie, de la chimie, de la conscience ? Des distances immenses, dans transformations lentes ou rapides, de la joie et des pulsations ? C'est une des forces de la littérature de science-fiction que de nous donner à saisir, à percevoir, les vertiges du temps. On appelle ça le sense of wonder. 

NOUT est un tissage de visions, de faits, des rêves, de vibrations. NOUT relie très haut, très loin. Ce livre nous rassemble, nous, les hominides, avec l'ensemble de la vie, de la Terre et plus large encore. Mais ce n'est pas un livre froid. 


Pour nous parler de cet avenir extra-ordinaire, luvan choisit une forme rare, en SF et en littérature en général, celle de la prophétie. L'avenir vient vers nous (comme ces gouttes sur l'arcane XVIII, la lune), une décoction nous parvient en vers, en conscience partagée avec ces êtres du futur, ces nous du futur, qui s'adressent à nous à travers une femme nommée
Francesca Caccini, musicienne et compositrice. Nos descendantes, qui ont hérité d'une bonne part de notre mémoire, utilisent toutes sortes de faits, de souvenirs, d'allusions culturelles ou mythologiques pour nous parler et communiquer avec nous. Je ne comprends pas tout, Francesca ne comprend pas tout, mais ce n'est pas grave, il faut se laisser aller, se laisser émerveiller. Lire luvan est une exploration.





12 juillet 2025

Bokshi - Bhargav Saikia

Vu au NIFFF en 2025

Une jeune femme bourgeoise indienne éduquée dans une école chic fait des rêves étranges qui la relient à une culture chamanique et à une forme de culte de la sorcière. Elle finit par se rapprocher de sa mystérieuse prof d'histoire qui, comme chaque année, organise une sortie de trekking scolaire dans les contreforts de l'Himalaya, pour se rendre à un lieux mystérieux, un bizarre nombril de la terre... What can go wrong ?




Ce film bancal et trop long a plein d'aspects cools. Notamment le goût très premier degré du récit. Le réalisateur y croit à fond et ça fait plaisir. Les décors sont super chouettes et surprenants pour nous Européens (maisons et boarding schools pour riches, montagnes et forêts), les acteurs sont très chouettes, les personnages plutôt intéressants, particulièrement l'héroïne, dont la relation à ses racines est tout à fait ambigue. J'ai eu aussi un vrai plaisir à entendre ce collage de langues, de l'anglais à l'hindi, au népalais jusqu'à la langue inventée des cultistes.

L'image est souvent aussi très chouette, notamment le jeu sur la couleur rouge.

Pour le reste, je trouve dommage la plongée finale dans la violence, qui ramène le récit dans un genre codé alors qu'on aurait pu se demander : quel avenir pour une femme initiée au culte d'une sombre déesse chthonienne ?

(cet article dit bien ce que je pense du film, avec plus de détails)

11 juillet 2025

Alpha - Julia Ducournau

Vu au NIFFF en 2025

On va commencer par l'évidence : Alpha n'est pas Titane. Titane est un film choquant et bouleversant qui m'a sécoué de bout en bout. Alpha est moins fort et moins fou. Ca n'en reste pas moins un film intéressant.





Alpha est un ado maghrébine forte en gueule, 13 ans, dans un collège assez moyen, qui déconne un peu. Sa mère est médecin, en un temps où se propage une épidémie flippante qui transforme les gens en statues de marbre. A cause d'un tatouage sauvage et d'une aiguille un peu crade, on se dit que, peut-être, elle est contaminée, et ça se sait au collège, ce qui ne lui rend pas la vie facile. Puis arrive l'oncle Amin, camé, qu'on doit accueillir dans l'appartement. "Ce n'est pas une faveur que nous lui faisons. C'est la famille."

Ce que ce film a de bien : son world building. Ville industrielle, grands ensembles, femme d'origine berbère qui se bat pour sa fille tout comme elle se bat contre la maladie, ambiance pré-téléphones portables, atmosphères étranges, sable rouge, vent, lumières bizarres. Nous l'avons vu en séance du soir et nous avons trippé.

Les acteurs sont super bien, très beaux, très intenses. La narration éclatée nous égare avant de trouver sa logique dans un récit familial touchant, avec presque une sorte de twist final. Certaines images sont incroyables (la lecture du prof d'anglais dans le noir, la scène de la piscine, la scène de l'échafaudage...)

Je lui reproche un truc assez important : à un moment, le récit de SF eighties-punk se révèle comme une allégorie tout à fait transparente d'autre chose de très clair et c'est dommage. Ca ne m'a pas empêché, deux jours après visionnage, de penser que j'ai beaucoup aimé.


10 juillet 2025

Reflet dans un diamant mort - Hélène Cattet et Bruno Forzani

Vu au NIFFF en 2025

Voilà un film super bizarre, très intéressant et auquel nous n'avons pas vraiment accroché.






Un ancien espion genre James Bond joué par (un/des) acteur(s) au vague air de Sean Connery se rappelle son passé dans un palace où il séjourne sur la côte d'Azur, notamment ses affrontements avec le boss du pétrole Zandt et avec le génie du mal Serpentik. On va parcourir la mémoire par associations visuelles, associations de lieu, de ce plutôt sale type.

Visuellement, en matière de montage, de création artistique, de création d'images, c'est dément. Le rythme est incroyable, comme une sorte d'impro jazz/funk déjantée, on enchaîne les images de palaces, de déco folles, de miroirs, de bastons, de torture, de violences, de mystères... Le jeu de références avec des trucs qui je connais et surtout des trucs que je connais mal est aussi assez fou. James Bond, bien sûr, mais aussi le cinéma d'exploitation italien, et les fumetti Neri (genre Diabolik) et les films d'arts martiaux et la mode des années 60 et sans doute un million de trucs...

Comme disent le gars et la fille derrière ce film (qui ont l'air trop cools), il est comme un diamant, avec mille facettes, mille choses à voir et à saisir. Et dans ce genre, c'est génial. Ca interroge aussi sur le masculinisme, la représentation des femmes dans ce genre de film, le virilisme des héros-qui-sauvent-le-monde, etc.

Mais mais mais à aucun moment je n'ai accroché à l'histoire. Le "héros" est un gros connard, encore moins attachant que Hubert de la Barthe OSS117 (qui a pour lui d'être une sorte de crétin magnifique). Ses aventures ne nous inspirent rien. On se fout un peu de ce qui arrive aux personnages, sauf peut-être un peu à la magnifique James Bond girl jouée par Céline Camara, incroyablement belle et classe.

Donc je suis ressorti à la fois excité par ce que j'avais vu et tout à fait froid. Ca m'a fait penser à Pulp Fiction (pour le côté collage de références, démontage narratif), avec la différence que dans Pulp Fiction je me rappelle avoir eu un certain attachement aux personnages, même si c'étaient des imbéciles.

Ca reste un film à voir quand même et je regarderai d'autres films des deux mêmes car Forzani et Cattet on un talent dingue. Une chose, peut-être, m'a séduit malgré tout : le jeu d'illusions et d'évanescences du personnage de Serpentik dont le masque ne cache jamais qu'un autre masque. J'ai retrouvé ce sentiment de fictions emboitées que j'associe à l'Italie, à la Commedia dell'Arte, aux premiers fumetti de Dylan Dog, au Dellamore Dellamorte... Un rêve à l'intérieur d'un rêve à l'intérieur d'un rêve.