Quelles vies avons-nous vécues avant de connaître celle-ci ? Pourquoi sommes-nous incapables de nous en souvenir ? Existerait-il un moyen de forcer la mémoire à nous revenir ?
Darrell Standing a été condamné à la prison à vie. Enfermé dans les cachots de San Quentin, torturé par des gardiens sadiques et par un directeur incompétent. Standing est condamné à souffrir les horreurs de la camisole de force, qui compresse le corps, écrase les organes internes et crée une souffrance que rien ne vient soulager. Jusqu'à ce que, communiquant avec lui en cognant sur les murs des cachots de haute sécurité, un certain Ed Morrell lui glisse le secret de la mort temporaire, qui permet de s'échapper de son corps et de retrouver, en conscience, le souvenir de vies antérieures...
Le vagabond des étoiles (the Star rover) est un étrange roman, mais c'est avant tout une vigoureuse dénonciation, très politique, du système carcéral et des mauvais traitements qu'on y subit. Coups, tortures, soumission à l'arbitraire d'une direction hors de tout contrôle... London a basé son texte sur le témoignage d'un ex-prisonnier condamné au cachot, Ed Morrell. Il y déploie son art du conteur, dans un mélange de style journalistique et pamphlétaire. Et au-delà des tortures et des coups, il emmène le lecteur dans les vies intérieures (à lui de décider à quel point il s'agit d'une mémoire, à quel point d'une imagination) d'Ed Morrell/Darrell Standing, dans des récits qui sont autant de nouvelles mêlés à la trame générale du livre, qui nous emmèneront sur les mers ou bien dans la peau d'un enfant membre d'une troupe malheureuse de pionniers dans les années 1860...
Le vagabond est un double roman "à thèse", sur la condition carcérale et sur la métempsycose, ce qui n'aide pas à faire de la bonne littérature. A moins que l'auteur ne s'appelle Jack London, car parvient à partir d'une matière aussi difficile à construire un livre plein de souffle, de force et de colère, qui j'ai commencé un soir avec un peu de curiosité et que je n'ai pu lâcher avant de l'avoir fini. Torture des corps, luttes sociales, puissance de l'imaginaire et de la fiction...
Et le lecteur des littératures de genre ne manquera pas de rapprocher le thème du Vagabond et les récits de James Allison de Robert Howard. La mémoire des vies passées nous permet de nous souvenir d'aventures sanglantes et furieuses, remontant parfois avant les début de l'histoire humaine telle que nous la connaissons...
(Et il faut que je continue à lire du Jack London. Quel écrivain !)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire