J'ai lu la campagne jusqu'au livre 4 inclus. Les défauts du texte restent les mêmes : c'est très souvent bavard et très souvent un compte-rendu de vieille partie. "A ce stade de l'histoire, les PJs devraient en être là...", suivez les indices du marchant ambulant et allez chercher l'objet magique A pour aller faire B..., vous arrivez là et hop, les méchants vous doublent et dérobent sous vos yeux et sans aucune raison l'objet magique C. Les motivations des PJs sont celles de héros pulp : ce granméchant veut faire ça, on va l'en empêcher. Bon.
Pourquoi j'insiste, alors ?
Parce qu'il y a aussi plein de décors et de scènes super. Je les liste : le voyage en avion et ses escales dans des lieux exotiques. La ville de Dairen, l'hôtel Yamato, etc., la petite ville portuaire, la secte de mendiantes, l'invasion japonaise, les pirates en jonques, l'île des pestiférés, les tatouages partout, les rêves d'opium...
Plus les petits extraits de bouquins d'époque et les photos (dont certaines, même si petites, sont carrément bizarres ou flippantes). Je vais donc continuer à le lire.
Je vois pour l'instant ce texte de jdr comme une collection de lieux et de scènes intéressantes à arranger de manière à ce que ça corresponde à mon (notre) goût.
Quelques idées qui me viennent pour modifier le truc d'une manière qui me convaincrait plus:
L'ennemi doit porter un nom de clan mandchou, par exemple Aisin-Gioro (=nom du clan) Bātú. Il est en fait le dernier chamane de la bannière blanche, éduqué dans la secte des Gardiens du Souffle Primordial, une société de "boxeurs" mystiques en contact avec de vieux secrets magiques liés aux ombres - ça permet de faire des Gardiens une société plus large avec un rôle au jour le jour dans la vie des gens. Notre Bātú est un nationaliste traditionaliste qui renoue avec avec des puissances animistes et des êtres endormis dans des lacs, sous les mers, sous les montagnes... Son père était dans l'entourage des derniers empereurs mandchous, lui-même est une sorte de Pu-Yi avec des sorts.
J'aimerais aussi que le fait de porter le sceau du dragon ait un effet immédiat et non pas "quand il aura été sacré, alors...". Mon idée : ça permet au maître du sceau de brièvement voir par les yeux ou diriger les gestes de la personne liée, notamment quand l'attention de cette dernière se relâche. Une forme d'extension de la conscience de l'ennemi. Pas un contrôle absolu, juste un pouvoir sur le corps de l'autre (pas d'accès aux souvenirs, par ex.).
Reste encore le problème principal de la motivation. Ma vague idée pour l'instant : les PJs sont liés à une mission diplomatique française cherchant à préserver les intérêts vacillants de la nation dans ce recoin du monde. L'un d'entre eux pourrait être George Guédon ! (bon PNJ, par ailleurs)
L'Appel de Cthulhu correspond à ce que j'aime le plus faire jouer et jouer. On peut jouer avec un cadre historique réaliste, Cecci et moi aimons tout particulièrement la période de l'entre-deux guerres (même si nous avons joué aussi dans l'empire romain, en 1905 ou en 1990...) et je suis personnellement très fan de l'imaginaire fantastique lovecraftien, option puriste (opposé au pulp, que je n'aime pas du tout).
J'ai backé les Cinq supplices, production originale des (défuntes) éditions Sans-Détour, parce que je backe à peu près tout nouveau scénario ou nouvelle campagne pour l'AdC. Je l'ai lue rapidement quand je l'ai reçue, ai eu un peu de mal à me motiver à la faire jouer, puis j'ai lu la terrible chronique de Nébal (qui est pourtant un homme pondéré) et j'ai repoussé l'idée.
J'ai repris ma lecture après quelques années et l'envie de voyager ailleurs après un détour dans les Caraïbes. La chronique de Nebal est toujours là, la campagne a toujours plein de défauts, mais je me demande si quand même je ne pourrais pas en faire quelque chose.
Attention, cet article va spoiler à donf'. Ne le lisez pas si vous voulez jouer cette campagne !
Ce qui me gêne dans cette campagne :
- la campagne est assez clairement basée sur une cool série de parties jouées par l'auteur et l'implication des PJs est carrément floue parce qu'il manque la description des PJs de ses copains - une bande de mecs, BTW, si j'en crois les remerciements. Ca n'en fait pas obligatoirement un bon scénario pour les autres.
- C'est très pulp et c'est inspiré d'une nouvelle (skull face) de REH - je suis fan de REH, mais il n'est pas le roi de la finesse, c'est rien de le dire.
- Le méchant est clairement un clone de Fu-Manchu. Or, le concept du méchant Chinois maléfique qui veut devenir maître du monde ne me plaît pas plus que ça - si on oublie Winnie l'Ourson. (attention, ref subtile pour échapper aux censeurs chinois qui me liraient)
Mais il y aussi des choses qui me plaisent :
- L'auteur a fait des recherches et il a pas mal de doc de base et d'idées.
- Il y a plein de photos dans les bouquins qui donnent envie de jouer ! (signature Sans-Détour)
- Les illustrations sont super cool.
- La Mandchourie en 1931, voilà un cadre excitant !
- Il y a une jolie idée, sous jacente et pas dite directement : le méchant est une sorte de prêtre de Cthlulhu et le grand céphalopode peut être aperçu en transparence derrière cette histoire. Or, je n'ai jamais fait jouer de scénario où le grand méchant soit celui-ci même qui donne son nom au jeu.
- l'empire des ombres et les rêves d'opium me paraissent propices à une dose d'étranges contrées du rêve, à condition d'avoir un/des PJs camés.
J'ai donc re-commencé ma lecture en me demandant si je pourrais en faire quelque chose. Comme transformer ce machin pulp en aventure onirico-horrifique en mode Corto Maltese contre les Profonds.
Mon principal problème à résoudre est... l'intrigue principale. En résumé : les PJs doivent empêcher le grand méchant de faire un rituel pour devenir maître du monde. Course-poursuite, bang bang, etc. Je comprends très bien que certain.e.s aiment ça, mais ce n'est pas ma came.
Derrière ça, de bonnes idées : le grand méchant (qui a un nom de vilain de pacotille) est un nationaliste. En fait, le complot, en parallèle de son aspect surnaturel, est un complot menant à l'avènement du Mandchoukouo. Et ça, c'est assez cool. Un conflit autour de la création d'un nouvel état idéal dans le N.E de l'Asie ça me botte pas mal.
Pas question de faire de Sayk Fong Lee un "gentil", mais une fois que je lui aurai trouvé un nom mandchou cool j'aimerais lui trouver des motivations intéressantes - peut être que je les découvrirai dans la suite de ma lecture ?
Quelques commentaires sur le début
Je n'ai lu jusque maintenant que le livret 1 (synthétique et bien fichu, à part ça) et le début du livret 2.
Des mini-scénarios d'implication, je ne retiendrai que la vente aux enchères (bonne scène) et l'ombre dans le noir, assez cool.
Pour le début du livret 2, le côté : "oh, un incendie, oh un rituel, oh une jeune fille...", ça ne marche pas du tout, mais c'est facile à corriger. Il suffit d'impliquer les PJs dans une enquête de la police sur la disparition d'une jeune fille de "diplomate" et on fait paraître la société secrète comme les "méchants", ce qui est bien mieux. Et à la fin, récompense, ils la sauvent du milieu du supplice !
Plus de lecture et plus d'éléments... plus tard peut-être.
Cecci et moi aimons vraiment beaucoup aller au théâtre et nous étions très curieux de découvrir l'oeuvre d'Heinrich von Kleist, un homme avec un nom qui claque et une biographie intéressante, à défaut d'être joyeuse. Le synopsis de la pièce le prince de Hombourg nous bottait bien alors, malgré notre (très ennuyeuse) expérience précédente, nous avons pris des places pour aller le voir à Vidy.
Je ne vais pas mettre trop de photos du spectacle car les images disponibles sur le site du théâtre sont un peu trompeuses : elle ne montrent pas combien l'ensemble était moche.
Quelques mots sur ce qui était bien dans la pièce : le texte lui-même, et l'histoire pour ce que nous en avons vu, car nous sommes partis au bout d'un tiers de la représentation.
Pour le reste et contrairement au jardin des délices, le spectacle n'était pas seulement ennuyeux mais aussi très embarrassant. Il commence par cinq minutes de vidéo sans intérêt. Puis une séquence somnambulique avec la lumière qui clignote et fait mal aux yeux. Les acteurs déclament le texte d'une manière antinaturelle (je ne veux pas leur jeter la pierre, quelqu'un leur a sans doute demandé de jouer ainsi). Les costumes sont laids, un décor est laid, l'ensemble paraissait vouloir tout faire pour nous détacher du fait de croire à ce qui était représenté. Je peux comprendre ce genre de démarche artistique mais qu'on ne me demande pas de l'aimer.
Enfin, vers la cinquantième minute, un acteur s'est mis tout nu sur scène et a sautillé de longs moments au premier plan. A ce moment-là, nous avons craqué, Cecci, Marguerite et moi. Ce genre de choses n'est pas pour nous.
Nous avons quand même retiré de cette sortie l'envie de lire la pièce et, si possible, d'en voir un jour une représentation qui ne nous ferait pas fuir.
La semaine passée, nous sommes allés voir Wendy et Peter Pan au TKM, une mise en scène d'après la pièce de J.M. Barrie. Une histoire d'enfants, essentiellement jouée par des adultes de plus de 40/50 ans qui ont décidé de "jouer à Peter Pan". Une fois passée cette marche d'étrangeté, dont je comprends qu'elle puisse gêner, nous avons vu un spectacle très intéressant.
Peter Pan est un livre (une pièce/une histoire) très très bizarre, plein de folies dérangeantes, dans le même genre qu'Alice au pays des merveilles. On peut tenter des interprétations biographiques, psychanalytiques, symboliques, mais aucune ne parvient à cerner complètement le garçon qui ne veut pas grandir, et c'est tant mieux. La mise en scène de ce Wendy et Peter Pan propose plusieurs angles de lecture tout en conservant très bien la richesse de l'histoire. Elle souligne les aspects les plus étranges du récit (la colère du père Darling, les balancements émotionnels de Crochet, la violence des jeux des enfants...) au point d'en faire une pièce que je déconseillerais aux enfants non accompagnés. Le flyer indiquait clairement "à partir de dix ans", à raison.
Ceci étant acquis, nous avons vu un spectacle visuellement magnifique, avec une scénographique inquiétante et puissante et une mise en scène pleine de belles idées. Les yeux du crocodile, le rôle du fauteuil du père, les déguisements des personnages qui passent d'Indiens à pirates en quelques secondes, la fée rétameuse complètement ivre, le rôle de "mère" de Wendy, un Peter Pan complètement à l'ouest... Mention spéciale pour un capitaine Crochet magnifique, terrifiant et émouvant à la fois.