Retour au cinéma mentionné ici, car en sortant de la Panthère des neiges, nous avons découvert que le programmateur était fan d'animation japonaise et que nous pourrions y voir le nouveau film de Mamoru Hosoda en VO. Dont acte.
Et nous nous sommes installés dans les confortables fauteuils de la salle 2 pour nous prendre un grand bain de SF et de sense of wonder comme on en voit que rarement.
Belle n'est pas un film parfait, mais je n'ai pas envie de chipoter sur ses défauts. Le sujet, en deux mots: Suzu, une adolescente pleurnicharde, devient presque instantanément une méga-star dans le réseau social virtuel géant U sous le nom de Belle.
Dès les premières minutes, le film emmène dans une aventure visuelle et sonore complètement folle, rendant visible Internet, les réseaux sociaux et l'informatique d'une manière ébouriffante (ce que le réalisateur avait déjà fait dans Summer Wars, que j'avais adoré aussi). La scène où Suzu se connecte pour la première fois à U est faite avec un souci du vrai complètement fou, aussi bien dans le design des appareils (et même celui de l'URL de connexion !) que dans les interactions utilisateur à la beauté lumineuse.
Le film repose sur le contraste élégant, permis par l'animation, entre le monde virtuel et la "réalité", le petit coin de province japonaise, petit lycée, petite ville, restaurant de nouilles avec des tableaux sur les murs, ligne de bus en train de fermer, la gare... sans poser de discours simpliste sur cette dichotomie. Les réseaux sociaux sont à la fois invisibles et tout le temps présents, les accumulations de discours ont à la fois un effet violent et aucune importance (la scène de délire SMS parce que deux ados se sont tenus la main en public, transformée en scène de jeu vidéo de stratégie... dingue)
Le récit est, à la base, une comédie dramatique ado, ni plus, ni moins, très réussie. J'admire la capacité des scénaristes d'anime à me surprendre. Il y a bien plus, narrativement, dans Belle que dans bien des séries que j'ai regardées. Des surprises, des personnages qui sont différents de ce qu'on attend d'eux, des rebondissements, des gags idiots, des sous-récits dans les coins (le délire de l'artiste performer aux tatouages et de ses deux copines...). Element important : les personnages ne sauvent pas le monde, juste eux-mêmes (et c'est déjà pas mal).
Je passe aussi sur les références dont j'ai loupé sans doute les trois quarts. Disney, bien sûr, et toute une tradition du cyberpunk japonais (le film a pas mal d'échos avec mon préféré de Satoshi Kon, Paprika) et le reste de l'oeuvre de Hosoda (j'ai envie de revoir Summer Wars, autre comédie ado-réseaux sociaux).
Là où Paprika est un récit psychanalytique, adulte et très sexuel, Belle est ado, énergique et positif. J'espère que ça s'entend : j'ai adoré.